Voici donc une note bien bizarre, dans la mesure où la découverte des structures éditoriales derrière le sigle MkF a été bien plus passionnante que la lecture du texte qu’ils ont publié dans une de leurs collections érotiques…
Mais comme je ne voudrais pas perdre mes lecteurs en empruntant un chemin par trop tortueux, il vaut sans doute mieux de commencer par le début : Il y a quelques semaines, j’ai eu le temps de me balader dans les couloirs virtuels d’une de mes librairies numériques favorites, et j’y suis tombé sur un livre qui m’a quelque peu intrigué : La croisière du vice, par une dénommée Lucie Foulk, édité par la maison sus-nommée, MkF Éditions [1]J’ai pu remarquer que le livre a depuis changé d’éditeur, au moins par rapport à ce qui est indiqué sur la couverture, le sigle MkF y ayant cédé la place à la désignation « les érotiques ».. J’avoue franchement que c’était tout d’abord la couverture non dénuée de charme qui m’a assez inspiré pour dépenser les 3,99 € demandés par l’éditeur. Mais c’est surtout la difficulté de trouver ensuite des informations cohérentes à propos de ce même éditeur qui a réveillé l’envie de me servir de mon groin pour essayer de déterrer quelques truffes. J’aimerais quand même vous parler tout d’abord du livre en question, même si celui-ci n’a strictement rien d’une truffe ni d’une trouvaille quelconque.
Une lecture quelque peu indigeste
Au départ, il y a donc les plaisirs d’une villégiature sous les tropiques. On fait la connaissance de l’héroïne près de s’embarquer pour une partie de ski nautique, « la fermeture à glissière de [sa] combinaison […] à peine remontée jusqu’au nombril ». Une image, vous en conviendrez, des plus alléchantes. L’érotisme que dégagent ces premières pages captive le lecteur et celui-ci ne saurait rester indifférent au sort de la belle Lucie quand celle-ci manque de très près de s’écraser contre un récif, suite à l’insouciance de l’animateur aux contrôles du bateau. Et comme on est dans le domaine érotique, on ne s’étonne pas outre-mesure de voir les deux rescapés de ce mini-naufrage se préoccuper de tout autre chose que de leur sauvetage, une fois échappés au danger imminent de noyade.
Mais les aventures ne font que commencer, et Lucie se retrouvera sous peu à bord d’un navire de luxe sur lequel règne en maître incontesté l’italien Finaconti qui voyage au milieu d’un véritable sérail flottant. La suite donnera lieu à quelques belles rencontres, et à des scènes nettement moins appétissantes, vu que le commerce du sieur Finaconti tourne autour de la légendaire traite des blanches, bizness que finira par faire s’écrouler la belle et courageuse Lucie. Et comme on est aussi dans une sorte de conte de fée – genre qui côtoie l’érotisme de très près -, une des princesses finira par mettre la main sur le prince (sous les traits du fils adoptif de Finaconti, assez aveugle pour se tromper sur les affaires du vieux), tandis que Lucie plonge dans les bras de Marpesa, la belle Brésilienne qui saura la dédommager en lui faisant goûter aux plaisirs des charmes féminins.
Ce petit résumé est sans doute assez explicite pour vous faire comprendre que ce texte est l’équivalent numérique des livres qu’on pouvait (et qu’on peut sans doute toujours) acheter dans les gares, trop cochons pour être proposés par de vraies librairies, et malheureusement dénués de toute qualité littéraire. Il s’y trouve pourtant quelques belles pages, comme notamment le premier chapitre, où les descriptions font entrevoir l’eau de mer et le sable doré sur lequel se vautrent les corps emmêlés de Lucie et de son amant de passage.
Certes, personne ne s’attend à trouver un chef d’œuvre derrière une couverture qui exhale l’ambiance de certains films des années soixante-dix, mais le lecteur le plus indulgent finit par être excédés par les maladresses du vocabulaire comme par exemple les sempiternelles répétitions de l’adjectif sexuel dont l’auteur affuble pratiquement tous les noms qui pourraient évoquer le plaisir. Et je vous avertis que si j’entends désormais parler quelqu’un de chair, de bouton ou encore de fruit sexuels, j’aurai du mal à retenir mes envies de lui planter un pied dans la région correspondant à celle opposée à ces mêmes organes.
Tout ça est bien dommage, parce que les défauts font presque oublier qu’il y a dans ce texte de belles parties qui font honneur à la plume qui les a couchées sur le disque de quelque ordinateur. L’impression que laisse la lecture de ce petit roman est celle d’un auteur beaucoup trop pressé de finir son travail, payé sans doute à un niveau qui l’oblige à sortir les textes au rythme dicté non par l’inspiration mais par une sorte de travail à la chaine éditorial.
MkF éditions – un éditeur iceberg
Vous l’aurez compris en lisant le premier paragraphe de cette note, j’ai l’habitude de faire des recherches autour de mes lectures. J’ai donc essayé de voir ce qui se cachait derrière ces trois petites lettres : MkF, et il a fallu quelque peu pousser avant de tomber sur des renseignements à peu près valables. J’ai tout d’abord trouvé le site tout ce qu’il y a de plus sérieux des Éditions MkF qui se propose de s’emparer « de l’arrivée du numérique et de ses opportunités pour produire, éditer et développer, un contenu exigeant sous les formes les plus pertinentes et adaptées » [2]Cf. la partie « Qui sommes-nous ? » de leur site. Rien pourtant sur ce site qui indique qu’on puisse avoir affaire à un éditeur érotique. J’ai donc posé quelques questions à des personnes susceptibles de connaître le milieu, et j’ai été dirigé vers la collection Léa de ce même éditeur, et notamment le site Les érotiques, actuellement en maintenance. Finalement, après un certain temps passé sur Google & Cie, j’ai réussi à dégoter la personne derrière tout ça sur LinkedIn : M. Mikael Ferloni, « Directeur des éditions chez MkF éditions ». Et c’est dans son profil sur ce réseau professionnel que se trouve l’énumération des collections érotiques de la maison avec notamment « Les Nouvelles Amazones » à côté de la collection Léa. Y figurent aussi leurs activités moins sulfureuses parmi lesquelles notamment « Les Humanités Numériques ». Et c’est par la personne de ce même M. Ferloni que se fait le lien avec les Éditions de Conti (« maison spécialisée dans l’édition de Beaux-Livres ») mentionnées sur le site des Éditions MkF. Tout un paysage éditorial donc qui s’abrite derrière ces trois petites lettres qui, elles, ne sont pas sans me rappeler le nom d’un certain directeur des éditions.
Tout ça est pourtant bien innocent, et ne sert qu’à vous montrer que l’édition peut facilement ressembler à des icebergs, dont, on le sait, la plus grande partie est immergée. Espérons toutefois que les autres titres de leurs collections fassent une meilleure publicité à la maison dont ils sont issus.
Lucie Foulk
La croisière du vice
Les Nouvelles Amazones
MkF Éditions
ISBN : 978−2−919071−28−9
Références
↑1 | J’ai pu remarquer que le livre a depuis changé d’éditeur, au moins par rapport à ce qui est indiqué sur la couverture, le sigle MkF y ayant cédé la place à la désignation « les érotiques ». |
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↑2 | Cf. la partie « Qui sommes-nous ? » de leur site |
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