Ces cinq nouvelles de Christy Saubesty, tout récemment publiées aux Éditions Sharon Kena (passées depuis en auto-édition, passées ensuite dans la collection Sextasy des Éditions Numériklivres), sont qualifiées d’érotiques par son éditeur. On se demande pourtant, après lecture, si ce terme est celui qu’on voudrait appliquer à des récits qui ne se bornent pas à faire naître des envies, mais qui mettent carrément en scène l’acte même et qui n’hésitent ni à montrer des sexes en action ni à faire répandre les liquides de la volupté. On se demande si on ne frôle pas ici le domaine du pornographique, terrain, soit dit en passant, que des auteurs comme Henry Miller ont annexé une fois pour toutes aux vastes champs de la littérature.
Cinq nouvelles donc, et cinq femmes qui finissent par se trouver un amant. Que ce soit la touriste en détresse qui se surprend à fantasmer sur le plombier venu la secourir, la victime d’un accident en rééducation qui profite des capacités de son kiné, la libraire coincée que son ami gay jette entre les bras d’un collègue, la femme de chambre séduite par les propos censés inaudibles d’un locataire ou encore la danseuse d’une boîte de nuit qui « taille des pipes » tout en étant vierge.
L’intrigue ainsi mis à nu, on pourrait prendre les nouvelles du recueil pour des scénarios de film X. Mais ce serait se méprendre. Tout comme une histoire d’amour peut donner soit du Shakespeare soit un roman abondamment aspergé à l’eau de rose, des histoires de cul peuvent se trouver dans les salles obscures et gluantes des cinémas de banlieue, tout comme sur les pages d’un livre sorti des presses d’un éditeur sérieux. Et avec Christy, on est loin des salles de cinéma.
Les femmes de ces nouvelles sont des prisonnières. Que ce soit leur corps (surdité, blessures suites à un accident, virginité) ou leur psyché (traumatisme, solitude) qui les enchaînent, il s’agit de prendre la fuite, et de passer à travers des obstacles qui les empêchent de jouir de la plénitude de la vie. Ces obstacles se dressent pour être percés, et l’outil de cette pénétration hautement symbolique n’est que trop heureux de se présenter à portée de main (ou de langue, c’est selon). L’acte sexuel est ainsi assimilé à un acte libérateur qui permet d’accéder à un niveau supérieur. Les angoisses qui vont de pair avec une telle initiation ne font pas défaut et il faut passer par bien des blessures avant de pouvoir se relever – parfois littéralement, comme dans le cas de Sarah, héroïne de « Soins à domicile » et clouée au lit suite à des blessures à l’échine dorsale, dont la nouvelle raconte comment elle est remise sur pied. Mais ne vous inquiétez pas, elles y arrivent toutes.
Christy a le courage de rendre ses lecteurs témoins des ébats de tous ces couples, dont nous partageons ainsi une tranche de vie bien juteuse, avant de les laisser partir vers un avenir impossible à connaître. Elle met en scène des corps avides de chair humaine et assoiffés des liquides que fait couler la passion, et elle ouvre les yeux non seulement à ses protagonistes mais aussi à ses lecteurs dans le but de (dé)montrer la beauté de nos corps, ces outils qui ne demandent qu’à être mis au service du bonheur et de la plénitude.
Mise à jour
Les récits rassemblés dans le volume Tout feu, tout flamme sont désormais disponibles dans les trois volumes des Best of érotique , en version numérique toujours, aux Éditions Numériklivres :
Christy Saubesty
Best of Christy Saubesty, Vol. 1
(Douce folie, La stagiaire, Soins à domicile)
Best of Christy Saubesty, Vol. 2
(Le Journal de Lucie, Les Fantasmes d’Angélique, Le Feu de la passion)
Best of Christy Saubesty, Vol. 3
(Le Prince égyptien, Crazy in love, L’Amant sans visage)
Numériklivres