De temps en temps, les visiteurs assidus de la Bauge le savent, le Sanglier se permet quelques instants de plaisir en jetant son dévolu sur des textes à caractère plus ou moins ouvertement pornographiques, sans la moindre vocation littéraire, content de faire vivre aux lecteurs de nombreux instants chantilly. C’est ce qui m’est arrivé tout récemment quand j’ai excavé, des fonds sombres de ma liseuse Kindle, un texte que j’avais acheté il y a plusieurs mois comme en passant, séduit par la couverture et un sous-titre des plus hilarants : Latifa à mes pieds – Une beurette lubrifiée, le tout signé Elvira Vodianova, une autrice avec à son actif des titres aussi ouvertement évocateurs – pour ne pas dire explicites – que Terrains glissants & trous à fourrer ou encore Bestiales, Buccales, Annales.
L’intrigue, on s’en doute, est assez sommaire, tout juste construit pour faire le tour des points culminants de toute production porno qui se respecte : Fellations, pénétrations, sodos, avec comme passage obligé une virée en tribadie avec force léchages de moule et frottages de chatte. Bref, un scénar des plus classiques pour vidéo lambda Youporn et al.
Et puis, surprise, il n’y a pas que « ça ». L’autrice m’a véritablement surpris quand j’ai vécu, avec la protagoniste restée seule après une partie de jambes en l’air, le désarroi de la femme abandonnée après l’orgasme du mec qui, s’il aime la baise et ne peut se soustraire aux appels de la libido, n’a rien à faire de l’être humain qui se bouge sous lui, qu’il arrive même parfois à faire frémir, et qui, finalement, lui importe si peu. J’ai très rarement – et c’est dire avec le nombre de textes érotico-pornographiques que je dévore presque quotidiennement – vu un traitement aussi pertinent de l’homme post-orgasmique, confronté à une libido post-coïtale qui frôle la flatline des arrêts cardiaques. Ce mec qui soudain – comme si, en se vidant les couilles, il s’était au même instant vidé de toute compassion humaine – a honte de soi et n’aspire plus qu’à regagner son foyer et sa légitime afin d’oublier aussi vite et aussi totalement que possible son rendez-vous avec une part d’héritage qui pourtant surgit si régulièrement d’entre ses cuisses pour prendre le contrôle.
La lecture de ce texte finalement pas si petit que ça m’a donc valu une surprise aussi belle qu’inattendu, et c’est assez pour le recommander – si toutefois ce genre de textes te convient un tant soit peu, lecteur chéri, lectrice adorée ! Et ceci sans évoquer le plaisir de devenir, pendant une petite centaine de pages, le complice des nombreuses galipettes de la protagoniste. Complice libéré, ce qui plus est, du besoin de toujours réfléchir et de justifier envers quiconque les émotions nées à travers une lecture finalement très – innocente.
C’est à mon plus grand désarroi que je viens d’apprendre, à l’instant de terminer cet article, que le texte en question – ainsi que la presque totalité des nombreux autres textes de l’autrice – a été retiré de la vente. Suite à quelle décision prise à quel niveau ? Je n’en ai aucune idée, et j’espère qu’on les verra réapparaître un de ces jours. En attendant, je regrette de ne pas être en mesure de vous pointer vers un endroit où le lecteur séduit par mes réflexions pourrait faire le plein d’un érotisme totalement décomplexé qui n’a pas honte de dire son nom et de (faire) balancer la sauce. En attendant de les voir réapparaître, je profite de celui qui se trouve dans ma liseuse pour en extraire une liste des textes de l’autrice. Attention à ne pas baver sur le clavier ;-)

Cette si soudaine disparition me rappelle d’ailleurs un cas semblable, celui de Barbara Shumway, autrice américaine dont j’ai fait entrer plusieurs titres dans la Bauge – pas toujours si – littéraire et dont la plupart des textes a tout simplement disparu des catalogues de ses éditeurs respectifs. Dommage !
Elvira Vodianova
Latifa à mes pieds
Éditions Aphrodisie
ASIN : B06Y2DTM1M
