Mar­ché du livre : recul des librai­ries en ligne en Allemagne

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En Alle­magne, la librai­rie tra­di­tion­nelle serait en train de gagner du ter­rain par rap­port à la librai­rie en ligne. C’est ce qui res­sort d’une étude menée par l’As­so­cia­tion des libraires alle­mands (Bör­sen­ve­rein des Deut­schen Buch­han­dels) à pro­pos du mar­ché du livre en Alle­magne. Voi­ci un énon­cé assez intri­gant pour regar­der cela de plus près.

Le marché du livre 2013: la librairie traditionnelle vs. la librairie en ligne
Le mar­ché du livre 2013 : la librai­rie tra­di­tion­nelle vs. la librai­rie en ligne. Source : Bör­sen­ve­rein des Deut­schen Buchhandels

Info­gra­phiques à l’ap­pui, l’as­so­cia­tion démontre que le chiffre d’af­faires de la vente en ligne est, pour la pre­mière fois depuis des années, en net recul, celle-ci ayant atteint un CA de 1.599 mil­liards € en 2013, ce qui la place à un niveau infé­rieur de 0,5% par rap­port à 2012. En même temps, le CA des ventes tra­di­tion­nelles (en librai­rie) monte de 0,9% pour atteindre la somme impres­sion­nante de 4.639 mil­liards €. Il est sans doute trop tôt pour conclure à une ten­dance durable et au ren­ver­se­ment défi­ni­tif d’un para­digme qu’on croyait éta­bli depuis des années, mais il est inté­res­sant de consta­ter cette ten­dance au moment pré­cis où on annonce, en France, la dis­pa­ri­tion pro­chaine des libraires. Quant aux rai­sons de ce déve­lop­pe­ment, il est très dif­fi­cile de se pro­non­cer , même s’il est ten­tant d’in­vo­quer la dété­rio­ra­tion de l’i­mage de marque du géant de Seat­tle suite à la décou­verte, d’un côté, des condi­tions de tra­vail pré­caires dans les centres d’ex­pé­di­tion et, de l’autre, de la prise de conscience de la gra­vi­té de l’é­va­sion fis­cale (mais néan­moins légale) au Luxem­bourg où Ama­zon pro­fite de taux d’im­po­si­tion net­te­ment plus inté­res­sants qu’en Alle­magne (ou en France).

Pour ce qui est de l’e-book, on peut dire, avec Mat­thias Hen­rich, membre du comi­té direc­teur de l’As­so­cia­tion, qu’il est deve­nu un fac­teur qu’il faut prendre en compte avec ses presque 4% de parts de mar­ché. Un pour­cen­tage qui équi­vaut à 21,5 mil­lions de titres ven­dus. Avec 3,4 mil­lions de per­sonnes qui auraient ache­tés, en 2013, des e‑books, cela revient à une moyenne de 6,4 titres par per­sonne. Un chiffre dont on com­prend la signi­fi­ca­tion quand on sait qu’il y n’a­vait que 0,7 mil­lions ache­teurs d’e-books en 2010. Le nombre de per­sonnes capables d’a­che­ter et de lire des e‑books a donc quin­tu­plé en l’es­pace de trois ans, ce qui démontre, d’un côté, la plus grande dif­fu­sion d’une tech­no­lo­gie de plus en plus acces­sible au grand public et, de l’autre, l’in­té­rêt d’un nou­veau for­mat de lec­ture qui per­met en plus de faire des éco­no­mies impor­tantes par rap­port au livre tra­di­tion­nel, 85% des e‑books étant pro­po­sés à des prix plus inté­res­sants que le livre imprimé.

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Mal­heu­reu­se­ment, les chiffres indi­qués préa­la­ble­ment à la publi­ca­tion de l’é­tude le 30 juin 2014 ne contiennent pas le CA en chiffres abso­lus de la vente de livres numé­riques. Il n’est pas pos­sible non plus de l’ob­te­nir en fai­sant les cal­culs sur la base du CA du sec­teur entier, vu que les 3,9% avan­cés se rap­portent au mar­ché grand public (sans livres sco­laires et spé­cia­li­sés). Et je ne sais pas non plus à quel point peut être fiable le résul­tat obte­nu en mul­ti­pliant les 21,5 mil­lions uni­tés ven­dues avec le prix moyen de l’e-book alle­mand qui serait de 7,58 €. Pour illus­trer le pro­blème de la valeur toute rela­tive de tels pour­cen­tages, on peut citer deux études fran­çaises qui donnent la part de mar­ché du livre numé­rique avec res­pec­ti­ve­ment « 1,1% du chiffre d’af­faires de l’é­di­tion grand public » [1]Éco­no­mie du livre : ce que change le numé­rique, article publié le 21/03/2014 et (pour 2012 !) « 3,1 % du CA ventes de livres » [2]Chiffres-clés du sec­teur du livre 2012 – 2013, Les ventes des livres numé­riques des édi­teurs. Consta­tons qu’il n’est pas aisé de se retrou­ver dans un mar­ché aus­si com­plexe et qu’il serait facile de pré­sen­ter des chiffres dif­fé­rents selon les cas que ceux-ci sont cen­sés illustrer.

Il faut sans doute attendre fin juin pour dis­po­ser d’in­di­ca­tions plus pré­cises, mais ces quelques chiffres peuvent au moins don­ner une pre­mière idée à pro­pos de l’é­tat du mar­ché du livre en géné­ral et de celui de l’e-book en par­ti­cu­lier de ce côté-ci du Rhin. Un état qui per­met sans doute aux acteurs du livre hexa­go­naux d’en­tre­voir eux aus­si un ave­nir légè­re­ment plus brillants. Quant aux recettes à appli­quer pour obte­nir un tel résul­tat, il fau­dra sans doute aller voir sur le ter­rain et répondre aux attentes d’une clien­tèle dont les exi­gences ne sont plus celles des décen­nies pas­sées, au lieu de se conten­ter de deman­der des sub­ven­tions, une manne trop facile qui risque de figer les habi­tudes des prin­ci­paux acteurs qui se sont mon­trés de moins en moins à la hau­teur du défi lan­cé par la numé­ri­sa­tion de la lec­ture et des canaux de distribution.

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Réfé­rences

Réfé­rences
1 Éco­no­mie du livre : ce que change le numé­rique, article publié le 21/03/2014
2 Chiffres-clés du sec­teur du livre 2012 – 2013, Les ventes des livres numé­riques des éditeurs
Dessin d'une femme nue debout, vue de profil. Elle tient un gode dans la main droite qu'elle est en train de s'introduire dans le vagin.
Dessin réalisé par Sammk95

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