C’est en septembre 2011 que Vincent Bernard, collaborateur d’un éditeur numérique pure player, les Éditions Edicool, est venu vers moi pour m’exposer le projet d’une nouvelle collection à laquelle il m’invita en même temps de participer : chaque volume rassemblerait, autour d’un sujet donné, dix auteurs et ceux-ci disposeraient de mille mots pour en dire tout le bien ou tout le mal qu’ils voudraient. La brièveté des textes serait compensée par le grand nombre d’auteurs, et la concision de la parole, réfléchie dans la multiplicité des regards. Je fus tout de suite séduit.
Le sujet du volume pilote fut dicté par l’actualité médiatique du moment, l’affaire DSK, qui avait éclaté quelques mois auparavant et dont les retombées faisaient bramer les journalistes et les lecteurs avides de piquant. Les 10… Petites Suites 2806, premier volume de la collection « Les 10 », se chargèrent de leur en donner, du piquant.
La direction du recueil suivant, le premier à s’aventurer dans les terrains encore mal connus de l’ebook enrichi, fut confiée à Franck-Olivier Laferrère, un des auteurs du premier volume des 10 et co-fondateur du collectif artistique Cid Errant Prod. Il parut le 14 février 2012, date incontournable pour un recueil répondant au doux titre : Aimer, c’est résister. Et quel meilleur choix pour un effort en commun que celui d’un collectif à la vocation transmédiatique et pluridisciplinaire établie de longue date, et dont les aspirations répondent à merveille à la volonté multimédiatique de ce volume, co-publié d’ailleurs par e‑fractions éditions, à savoir l’intégration de plusieurs médias, avec notamment des illustrations de Gorellaume, Pwcca, Jeff Roland et Alizé Meurisse et de la musique en « toile de fond » composée par Caroline Duris Metatechno. Mais comme le format enrichi, standardisé il y a peu par la dernière mouture de l’EPUB, tarde à s’imposer malgré les nouvelles fonctionnalités assez impressionnantes présentées par l’éditeur Walrus, le titre reste, à cette date, l’unique ebook à vocation multimédia dans le catalogue d’Edicool.
Pendant que Franck-Olivier terminait sa course, j’entamais la mienne en rameutant des auteurs de ma connaissance pour un projet certes moins intello que les deux précédents mais qui devait rajouter une pincée de sel à la collection en ouvrant la porte à l’érotisme. Et comme l’été approchait et que le besoin de soleil et d’air frais se faisait sentir chaque jour davantage, le sujet fut bientôt trouvé : Les Vacances Pourries. Dix textes pour mettre en scène les échecs et les frustrations collectifs vécus par tous ceux et toutes celles qui essaient d’échapper, ne fût-ce qu’un instant, aux contraintes du quotidien pour un peu de lumière et de bien-être. Un sujet méchant s’il en est, et qui n’a pas manqué de mobiliser de nouvelles plumes pour la cause numérique, comme celles de Marie Godard et d’Anne Bert, toutes les deux publiées par des maisons prestigieuses, comme celle de Franck Spengler, les Éditions Blanche, les Éditions Tabou ou encore Hors Collection. La couverture a été réalisée par Jahyra, une jeune illustratrice qui a déjà mis son pinceau numérique au service de la collection e‑ros des Éditions Dominique Leroy, dirigée par ChocolatCannelle.
Finalement, et c’était vers la fin de ce même été, Hervé Fuchs, l’auteur des Folles de la Nationale 4, se souvint d’un jeu littéraire mis à l’honneur par les Surréalistes, et le principe du cadavre exquis entra dans la collection des 10, apportant une nuance réformatrice au concept élaboré par Vincent Bernard un an plus tôt : les auteurs, désormais, devaient se relayer en enchaînant leurs récits grâce à un billet de loterie trouvé, perdu et retrouvé par des personnages toujours renouvelés au fil du genie de leurs inventeurs. Si cette nouvelle approche apporte une certaine cohésion aux textes tout en gardant la diversité du concept originel, elle a aussi créé un nouveau problème qu’il faut savoir gérer, celui du temps : Comme les auteurs étaient obligés de travailler l’un à la suite de l’autre, il fallait compter plus de temps pour mener à bien le petit dernier de la série. Aux lecteurs de dire si l’éclat des Yeux de Fatalitas est à la hauteur des attentes.
Je ne vais quand même pas clore cet article sans rassurer mes lecteur sur la suite de l’aventure. Un cinquième recueil est en route, et arrivera précisément deux semaines avant Noël. Vous aurez donc l’occasion d’offrir un beau petit texte à tous ceux qui auront trouvé une liseuse ou une tablette sous le sapin.
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