Vous qui aimez les fantasmes, les belles femmes pulpeuses qui réclament leur droit à la jouissance, les scènes torrides qui ne laissent rien à désirer, le tout généreusement assaisonné de bonne humeur, vous allez être servis par ce recueil signé Léon de Griffes, Les Vies d’Adèle. Adèle est la protagoniste de quatre nouvelles où elle incarne, au gré des lubies de son créateur, plusieurs existences, même si elle reste, au fond, la même : « une belle blonde aux formes épanouies qui traîne dans la vingtaine ». Tour à tour professeure aux méthodes peu conventionnelles dans un lycée professionnel, assistante d’un justicier masqué, photographe érotique malgré elle et actrice porno, on peut dire qu’Adèle est, dans chaque incarnation, tout simplement excellente.
« Attendez, mon cher, ai-je bien entendu justicier masqué ? Permettez que je rigole ! » Et bien, franchement, oui, cher lecteur, chère lectrice, rigolez ! Il est rare, beaucoup trop rare, de voir le rire pénétrer dans les récits érotiques, et on peut se demander si certains rendent vraiment service au genre en cachant la bonne humeur derrière un masque, peu importe que ce soit celui du dominateur ou celui de l’homme blasé, revenu de tout. On pourrait croire que ceux-ci prennent leur plaisir tellement au sérieux qu’ils finissent par l’étouffer, et par ressembler à ces coincés du cul qu’ils aimeraient pourtant ridiculiser. Rigolez donc, libérez-vous dans un franc rire, et laissez-vous enchanter par l’érotisme bon enfant de Léon de Griffes qui sait introduire l’humour dans ses contes.
Mais commençons par le début, et par cette belle idée de créer une seule héroïne que le lecteur aura le plaisir de voir évoluer dans des décors radicalement différents. Un côté particulièrement charmant de cette approche consiste dans la création d’une sorte d’aura faite de vies antérieurs qui colle à la peau de la protagoniste, lui conférant comme une profondeur nourrie des souvenirs du lecteur. En plus, et il faut l’avouer sans la moindre jalousie professionnelle, Léon de Griffes a réussi à créer, avec son Adèle, un personnage des plus attirants, une femme délicieuse dont on aime suivre les aléas auxquels elle est confrontée à travers ses différentes incarnations.
Comment ne pas tomber sous le charme de la prof qui sait se servir de ses atouts pour faire embrasser à ses étudiants une matière plutôt revêche comme ce sont les sciences économiques ? Le moyen de rester de glace devant le charme contagieux de l’actrice porno qui se voit démasquée en pleine réunion familiale et qui se trouve tout d’un coup être la cible de tous les préjugés et de tous les fantasmes à la fois ? Qui resterait de glace devant le trouble qui s’empare de la jeune photographe, victime de viol (ou du moins d’une tentative, ce n’est pas très clair), qui se voit embarquée dans un maelstrom érotique par un couple soucieux de rendre éternel les moments les plus intimes de sa vie conjugale ? Et comment ne pas éclater de rire face aux velléités de l’ancien commando de rétablir la justice dans les rues en se glissant dans la peau d’un Watchman, tentative vouée, évidemment, à un échec des plus lamentables ?
Il y a donc plein d’humour dans ces quatre nouvelles, ce qui, vous avez pu le constater, n’est pas sans déplaire à votre serviteur. Mais la plume de M. de Griffes est aussi capable de peindre toutes les nuances de la sensualité, de la tendresse d’un toucher à peine ressenti jusqu’aux délices d’une pénétration profonde qui se pare à l’occasion des plaisirs de la douleur noyée dans les vagues d’un orgasme montant.
Après avoir longuement vanté les mérites de ces petits textes et la sensualité par trop séduisante de leur héroïne, j’ai une bonne et une mauvaise nouvelle pour vous. Enfin, mauvaise, façon de parler, comme vous allez voir. Le recueil réunissant les quatre textes que je viens de vous présenter est actuellement indisponible. Les textes sont par contre disponibles séparément sur Amazon où vous pouvez vous les procurer sans le moindre délai. Et le recueil, quant à lui, reverra le jour dans une version augmentée (avec une vie supplémentaire, presque comme dans les jeux pour ordinateur), début juin, chez l’éditeur Angels Editions. Si vous optez pour le recueil, il faudra donc faire preuve de patience avant de pouvoir suivre la belle Adèle dans ses aventures , mais pourquoi ne pas profiter de ce délai imposé pour découvrir un autre texte qui allie humour et érotisme ? On pourrait par exemple se laisser tenter par Ces Dames de l’annonce, un recueil signé Philippe Lecaplain qui vous fera le plus grand bien si jamais vous aviez besoin d’une bonne dose d’humour. Mais je tiens évidemment , nonobstant ce minuscule désagrément, à féliciter Léon de Griffes d’avoir su trouver un éditeur qui fera vivre son Adèle, protagoniste aussi charmante que lubrique dont les exploits feront, j’en suis sûr, plus d’un heureux parmi mes lecteurs.
Avant de vous laisser à votre imagination (que je me plais d’imaginer fertile), un dernier mot à propos de la couverture, celle au moins qui accompagne l’édition parue chez Atramenta. Je la trouve franchement adorable dans son approche très légèrement ironique, présentant la protagoniste avec un petit air d’agent secret qui n’est pas sans rappeler, comme dans une très lointaine réminiscence, les couvertures des SAS. Et puis, ces connotations ironiques mises à part, c’est la parfaite incarnation d’Adèle telle que j’aime me la présenter : sensuelle, forte, capable d’assumer les rôles que la vie (sous les traits de Léon de Griffes) lui présente.
Léon de Griffes
Les vies d’Adèle
Auto-édition
ASIN : B01GY6BGN8