Cette fois-ci, c’est officiel, c’est la rentrée littéraire. S’il y avait encore des doutes, une newsletter reçue ce matin les a très efficacement dissipés. Et c’est Numilog qui le dit, librairie numérique apparemment soucieuse de noyer ses lecteurs sous l’avalanche des titres que l’édition française a l’habitude de faire partir une fois que l’été tout doucement touche à sa fin :

La liste des titres proposés par la librairie en ligne est révélatrice : Parmi les éditeurs, on trouve certains des plus grands noms du paysage éditorial : Grasset, Stock, Gallimard, Seuil, Actes Sud, Fayard, et j’en passe. Avec comme grands absents, encore une fois, toutes ces petites maisons pionnières de l’écriture numérique, les Pure Players, qui pullulaient au début de la deuxième décennie du XXIè siècle et dont certaines existent toujours, malgré la vague de disparitions qui ne cesse d’en emporter des nouvelles tous les ans : Walrus, Les Éditions NL, Publie.net, Les Éditions de Londres, Les Éditions Ska, et tant d’autres qui essaient toujours de s’imposer en donnant une voix à des auteurs souvent inconnus au bataillon. Parmi ces éditeurs numériques (et je persiste à les désigner comme tels, malgré le fait que beaucoup proposent aujourd’hui des versions papier de leurs titres) on trouve certes des approches différentes, et s’il y a des maisons plus « traditionnelles » comme par exemple les Éditions NL (anciennement Numériklivres) avec leur catalogue bien fourni, il y en a d’autres (là, je pense principalement à Walrus dirigé par Julien Simon dont l’alter ego Neil Jomunsi ne cesse de réfléchir à propos de ce que peut être la littérature à l’âge du numérique envahissant) qui essaient de donner de nouvelles impulsions à la littérature et à la façon de proposer et d’aborder des textes.
Il va sans dire que la rentrée littéraire, cette mégalomanie bien franco-française où les grands noms se taillent leurs parts de marché et où les figures – et les textes à leur suite – de saison en saison se ressemblent, passe à côté de ces « petits » éditeurs – si ce n’est qu’elle leur passe dessus, à la façon d’un rouleau compresseur. Et tout ceci sans même aborder le sujet des auteurs indépendants qui se passent entièrement des services d’un éditeur et partent tout seuls à l’aventure, comme des grands.
On ne change pas le monde en poussant des coups de gueule, et les habitués de la Bauge connaissent les préférences du Sanglier. Il suffit de parcourir la liste des titres pour se rendre compte que les Pure Players et les indépendants y ont un droit de cité tout ce qu’il y a de plus solide, et cette coutume n’est pas près de changer. Et soyez assurés, chères lectrices, chers lecteurs, de retrouver, sur ma serviette de plage que je m’apprête à étendre dans les criques de la Côte Vermeille, des auteurs et des titres que vous ne risquez pas de croiser en suivant les lecteurs moutonnants et les magazines littéraires, déjà dans les starting-blocks pour remâcher les noms que vous retrouverez de rentrée en rentrée, au point de faire partie du décor d’un paysage éditorial qui semble drôlement en manque d’inspiration.
Voici un échantillon des titres dont vous entendrez parler dans les semaines qui viennent :
- Michel Torres, Skaoté, t. 5 de la Saga de Mô (publie.net)
- Théo Kosma, En attendant d’être grande (auto-édité)
- Jean-Baptiste Messier, Hellixir (auto-édité)
- Galan Dorgia, Administre-moi (Evidence Editions)
- Stella Tanagra, Sexe primé (Tabou Éditions)
- Hugo Drillski, MILF (Tabou Éditions)
Tabou n’a certes rien d’un petit éditeur indépendant voire pure player, mais le monde de l’érotisme de qualité (entendre par là, tout ce qui ne peuple pas les étagères où les 50 nuances tiennent le haut du pavé) se rétrécissant comme peau de chagrin, je n’ai pu résister aux sirènes de leurs chargés de com” :-)
S’ajoutent à cela quelques titres de chez Ska gracieusement mis à la disposition de votre serviteur par Miss Ska elle-même, et une nouveauté de chez Hugo qui, si elle obéit bien à la logique des rentrées, me semble assez prometteuse pour faire des concessions – d’autant plus que j’ai grandement apprécié le premier titre de l’autrice, Décousue, paru jadis chez un petit éditeur suisse avant d’être disponible en version numérique chez L’ivre-Book. J’ai nommé Outrage de Maryssa Rachel.
Donc, chers amis, je ne chômerai pas, malgré les apparences, et quand d’autres me croiront occupé à faire la crêpe sous le soleil de septembre, je serai en train de vous préparer quelques petits morceaux pour célébrer une partie bien peu visible de la littérature.
PS : Oui, je suis sans doute trop dur avec la rentrée… On m’assure qu’on peut y faire de belles découvertes, et je n’empêcherai personne d’aller se promener dans les rayons des librairies pour y dégoter de nouveaux talents. Si seulement vous pouviez faire un tour chez les éditeurs numériques aussi ? Je vous assure qu’on y trouve des merveilles, et La Saga de Mô – pour ne donner qu’un seul exemple – réunit quelques-uns des meilleurs textes qu’il ait été donné à ma liseuse d’accueillir.
