Par­ris Quinn, La Plage

Un de ces jours, pri­vé de lec­ture esti­vale après le reten­tis­sant échec de Sexe à la plage, je me suis pro­me­né, en manque, du côté d’une de mes librai­ries pré­fé­rées dont la spé­cia­li­té est de pro­po­ser au cha­land des fan­tasmes illus­trés. Je parle bien évi­dem­ment de BD-Adultes, librai­rie vir­tuelle ani­mée par le sieur Car­te­let, jeune talent poly­va­lent en train de se tailler une répu­ta­tion d’en­fer dans le monde de l’é­ro­tisme fran­co­phone. Une fois entré dans cet uni­vers de fan­tasmes artis­ti­que­ment déli­rants, je suis presque aus­si­tôt tom­bé sur la série Ombre et Lumière signée Par­ris Quinn, auteur et des­si­na­teur amé­ri­cain, publiée en France depuis 2009 par Dyna­mite, « le label BD por­no de la Musar­dine »[1]D’a­près la des­crip­tion four­nie par l’é­di­teur sur son site..

Parris Quinn, La Plage, deuxième partie, p. 40. In : Ombre &V Lumière tome 5
À la plage – Chris et sa cou­sine Made­lynn prennent du soleil avant de se lan­cer dans des décou­vertes bien plus intimes. Par­ris Quinn, La Plage, deuxième par­tie, p. 40. In : Ombre & Lumière tome 5

Comme j’ai l’ha­bi­tude de fon­cer droit au but, sur­tout quand il s’a­git de récits por­no, je vous pré­sente ci-des­sus Claire et Made­lynn, deux des pro­ta­go­nistes de La Plage, épi­sode d’Ombre & Lumière où Quinn emmène ses lec­teurs dans un voyage au bout des fan­tasmes. Et rien qu’à contem­pler ce bré­vis­sime aper­çu, je parie que vous com­pren­drez com­ment j’ai été séduit aus­si rapi­de­ment. L’illus­tra­tion per­met non seule­ment de se faire une idée à pro­pos de la finesse du trait de crayon de Quinn, mais de consta­ter en même temps l’im­por­tance du texte dans ses tra­vaux, une impor­tance qui en fait plu­tôt des romans gra­phiques que des bandes des­si­nées, même s’il y a ensuite des pas­sages où c’est l’élé­ment visuel qui occupe les devants de la scène.

Les volumes de la série fonc­tionnent un peu comme des recueils, et cer­tains des épi­sodes pro­po­sés sont répar­tis sur plu­sieurs volumes, comme par exemple celui qui nous inté­resse aujourd’­hui : La Plage. J’en ai comp­té trois par­ties répar­ties entre les tomes 1, 2 et 3 de la série, au moins dans l’o­ri­gi­nal anglais[2]Dans la ver­sion fran­çaise, la deuxième par­tie se trouve, curieu­se­ment, dans le tome 5 d’Ombre & Lumière. À mon plus grand bon­heur, j’ai retrou­vé les deux pre­mières par­ties réunies dans un seul volume, The Beach, pro­po­sé à un prix très abor­dable par Ama­zon pour sa liseuse (et biblio­thèque) Kindle, tan­dis qu’il m’a fal­lu ache­ter le troi­sième épi­sode sur un site amé­ri­cain, le Inde­pendent Publi­shers Group, et je me suis retrou­vé avec un fichier ver­rouillé lisible uni­que­ment sur le logi­ciel Adobe Digi­tal Edi­tions… Si vous vous dites que c’est un peu le grand n’im­porte quoi voire le grand bor­del, je suis tout à fait d’ac­cord, mais bon, l’im­por­tant étant de pou­voir vous pro­po­ser une nou­velle lec­ture esti­vale bien adap­tée aux besoins de l’es­ti­vant en cha­leur, on ne va pas chi­ca­ner sur des ques­tions de format.

Des récits basés sur le réel ?

Le moins qu’on puisse dire, c’est que les infor­ma­tions à pro­pos de Quinn n’a­bondent pas sur la toile. Par­mi le peu qu’on trouve figure la notice que Quinn serait un « artist author, a res­pec­ted nude and land­scape pain­ter » qui aurait récol­té les confi­dences de ses amis pour les trans­for­mer en art : « All confi­ded to the artist author, »[3]Selon la des­crip­tion qui, sur le site d’A­me­ro­ti­ca, accom­pagne la maquette du tome 2 de Sha­dows & Light

Sur le site de la librai­rie numé­rique 7switch on trouve, sur la page du volume 6 d’Ombre & Lumière, la cita­tion sui­vante qui explique la méthode avec plus de détail :

Je crée mes per­son­nages et mes décors de façon à ce qu’ils soient réa­listes et cré­dibles. Ils vous semblent fami­liers car ils repré­sentent l’A­mé­rique midde-class d’au­jourd’­hui – ces gens pour­raient être vos voi­sins ou les héros d’une série télé popu­laire. C’est ce qui leur donne, je pense, leur puis­sance d’é­vo­ca­tion, au moins autant que ce qui leur arrive. À de très rares excep­tions près, mes modèles sont d’ailleurs des amis, et mes his­toires sont un mélange sub­til entre la vie réelle et des fan­tasmes tirés de mon ima­gi­na­tion. En tant qu’ar­tiste, les deux m’ins­pirent.[4]Page de pré­sen­ta­tion d’Ombre & Lumière 6 sur 7switch.

Des pro­pos cor­ro­bo­rés par un article paru sur NBM Euro­ti­ca, le blog éro­tique des Édi­tions NBM et de leurs auteurs. Inti­tu­lé Quinn the confes­sor, Robert Edi­son San­di­ford, auteur de BD éro­tiques lui-même, y indique à pro­pos des pro­ta­go­nistes de son confrère que :

Their sto­ries, declares the author, are true ; only the names have been chan­ged “to pro­tect the not-so-inno­cent-at-all.” These women claim, in a get-this/­sur­pri­sed-myself moment of cla­ri­ty, that their beha­viour is out of cha­rac­ter for them.[5]« Leurs his­toires, déclare l’auteur, sont véri­diques ; il n’y a que les noms qui ont été chan­gés « pour pro­té­ger les pas-si-inno­centes-que-ça. » Toutes ces femmes pré­tendent, dans un … Conti­nue rea­ding

Un beau détail cadrant par­fai­te­ment avec cette idée d’au­then­ti­ci­té est la pré­sence, pla­cé en guise d’in­ci­pit au début de chaque épi­sode conte­nu dans la série, de quelques don­nées sta­tis­tiques à pro­pos des per­son­nages, comme ceux par exemple qui pré­cèdent la deuxième par­tie de La Plage :

Parris Quinn, La Plage (Deuxième partie), Incipit
Par­ris Quinn, La Plage (Deuxième par­tie), Incipit

Des récits basés sur le réel – une telle affir­ma­tion est tout à fait légi­time venant de la part d’un auteur sou­cieux de pimen­ter ses textes en leur confé­rant une dose de vécu, un ingré­dient dont on com­prend la puis­sance dans un contexte éro­tique. Parce que, com­ment ne pas se poser des ques­tions à pro­pos de la voi­sine après avoir lu de telles confes­sions pla­cées dans la bouche de « vraies per­sonnes » ? N’ai­me­rait-on pas l’i­ma­gi­ner en train de s’a­don­ner à toutes sortes de pra­tiques dont la seule idée ali­mente effi­ca­ce­ment d’in­nom­brables séances de plai­sir soli­taire ? Et qui n’au­rait pas flir­té avec cette idée de pou­voir vivre des aven­tures à deux pas de chez lui, grâce à une ren­contre for­tuite, inat­ten­due, de s’embarquer avec une incon­nue sur­gie de nulle part dans un uni­vers où les fan­tasmes enfin peuvent se réaliser.

On com­prend faci­le­ment pour­quoi Quinn a choi­si une telle approche. De là à savoir ce qu’il en est réel­le­ment, c’est une autre affaire. Mais pour­quoi vou­loir détruire l’illu­sion, pour­quoi s’a­char­ner à savoir s’il y a vrai­ment, quelque part de l’autre côté de l’o­céan, une femme ayant consen­ti à mon­ter sur la moto d’un incon­nu pour se faire embar­quer au fond de ses fan­tasmes ? Et puis, l’art de Quinn est ailleurs. Parce que ses récits se racontent sur plu­sieurs niveaux, chan­geant de nar­ra­teur et de pers­pec­tive, créant un flou miroi­tant entre les per­son­nages comme un mirage où se perdent les regards. Si, dans la pre­mière par­tie, l’a­ven­ture de Claire et de Nick est racon­tée par un nar­ra­teur omni­scient, à la troi­sième per­sonne, la pers­pec­tive change dès la deuxième par­tie quand Claire, reve­nue de son week-end à la mer, livre à son mari, images et vidéos à l’ap­pui, le récit de ses frasques. Un pro­cé­dé qui per­met de jouer avec les pers­pec­tives, un défi aux lec­teurs de s’y retrou­ver. Défi qui s’ac­com­pagne, dans le cas de Quinn, d’illus­tra­tions qui, tirées de plans dif­fé­rents, se côtoient dans la mise en page, ce qui crée une confu­sion qui oblige à prendre du recul afin de – réflé­chir. C’est ce qui se passe au début de la troi­sième par­tie où Claire livre à son mari la suite de l’i­ni­tia­tion, par ses soins, de sa meilleure amie et où on peut s’é­ton­ner de voir Phi­lip en train de brou­ter sa femme tan­dis qu’au-des­sus celle-ci se fait bouf­fer la chatte par Madelynn.

À lire :
Le livre numérique - braderie littéraire ou support de textes originaux ?
Quinn, Shadow and Light, volume three, p. 21
Brou­tage de chatte sur plu­sieurs niveaux. Les aven­tures de Claire. In : Quinn, Sha­dow and Light, volume three, p. 21

L’en­chaî­ne­ment logique des évé­ne­ments est sus­pen­du au pro­fit d’une nar­ra­tion qui a lieu sur plu­sieurs niveaux tem­po­rels à la fois, le récit deve­nant à son tour sujet d’un récit.

La Plage – invi­sible point de départ

Après toutes ces consi­dé­ra­tions plu­tôt lit­té­raires et théo­riques, par­lons quand même un peu du récit. Vous aurez com­pris que c’est en pre­mier lieu le titre qui a eu le mérite d’at­ti­rer votre ser­vi­teur – La Plage. Parce qu’il ne faut pas oublier qu’il s’a­git ici d’une Lec­ture esti­vale. Et bizar­re­ment, si la plage est effec­ti­ve­ment un peu le point de départ de tout ce qui, par la suite, arrive à la pro­ta­go­niste, elle est étran­ge­ment absente du récit. Indi­quée plu­tôt que visible, elle n’a qu’une drôle de pré­sence loin­taine, à tra­vers quelques pal­miers qui rythment l’ho­ri­zon, ou quand elle sert d’ex­cuse pour per­mettre aux per­son­nages de ne por­ter rien que des maillots de bain ce qui, à son tour, per­met de mon­trer des corps en grande par­tie dénu­dés. Ce qui, dans un récit éro­tique, ne peut que faci­li­ter les affaires.

Quinn, La Plage, première partie, Claire et Nick, p. 9
Quelques pal­miers, des maillots de bain – voi­ci ce à quoi se réduit la plage dans la novel­la gra­phique homo­nyme de Quinn. (planche tirée de la page 9)

Quant aux aven­tures que s’ap­prête à vivre la pro­ta­go­niste quand elle décide de mon­ter sur la moto d’un incon­nu, elles n’ont rien d’ex­tra­or­di­naire dans le monde de la lit­té­ra­ture éro­ti­co-por­no­gra­phique et n’im­porte quel scé­na­riste de X en a déjà réa­li­sé l’une ou l’autre variante. Il y a d’a­bord le sexe avec le motard, dans un garage, un décor rem­pli d’un grand nombre d’ou­tils qui non seule­ment per­mettent de jouer sur le contraste entre la peau soyeuse et la dure­té de l’a­cier, mais qui donnent un grand nombre d’i­dées aux par­te­naires. Ensuite, si le décor reste le même, le scé­na­rio évo­lue vers le gang-bang avec l’ar­ri­vée de quelques copains. Et comme il y a une femme dans le tas, l’élé­ment les­bien, pas­sage obli­gé de n’im­porte quel film / texte de cul, peut être abor­dé avec la plus grande évidence.

Les choses évo­luent à par­tir de la deuxième par­tie, sur­tout au niveau de la nar­ra­tion qui se com­plique avec l’in­tro­duc­tion de plu­sieurs niveaux, comme je l’ai briè­ve­ment évo­qué quelques para­graphes plus haut. Quant à l’in­trigue, l’élé­ment les­bien passe au pre­mier plan avec la ren­contre entre Claire et son amie de lycée, Made­lynn. Une ami­tié qui, elle aus­si, pas­se­ra à la vitesse supé­rieure quand Chris l’é­pice par une ini­tia­tion des plus ban­dantes. Quinn réus­sit à mer­veille de rendre les sen­ti­ments des deux femmes, en cap­tant le mélange de timi­di­té et de défi qui se peint sur le visage de Made­lynn ou encore la fas­ci­na­tion de Chris pour le corps épa­noui de la qua­dra dont elle mani­pule les seins avec une déli­cieuse insistance.

La troi­sième par­tie nous réserve le retour au garage où Chris a don­né ren­dez-vous à la bande de copains de l’autre jour. Encore une fois, c’est le sexe entre les femmes qui domine la ren­contre, Chris ayant réso­lu de prendre sa revanche sur Suzie qui, la veille, a pro­fi­té de l’im­puis­sance de la femme enchaî­née pour lui infli­ger une séance de face­sit­ting et d’exer­cer ain­si sa domi­na­tion sur une femme de plu­sieurs décen­nies son aînée. À elle main­te­nant les joies de la sou­mis­sion, et je vous recom­mande tout par­ti­cu­liè­re­ment la page 25 du tome 3[6]Selon la numé­ro­ta­tion dans la ver­sion ori­gi­nale amé­ri­caine où on voit la jeune femme, pous­sée par un désir gran­dis­sant, pas­ser de l’ac­cep­ta­tion de l’i­né­vi­table à une avi­di­té qui accueille avec un plai­sir mani­feste tout ce que Chris a déci­dé de lui envoyer :

I got them rea­dy, sat up on a table, pul­led her face into my cunt and star­ted rip­ping through the comes, for­cing her to eat me, the boys conti­nuing to pump away on those beau­ti­ful cocks.[7]« Je les mis en posi­tion, m’ins­tal­lai sur la table, enfon­çai son visage dans ma chatte et enta­mai une série d’or­gasmes en l’o­bli­geant de me bouf­fer tan­dis que les gar­çons conti­nuèrent à bran­ler … Conti­nue rea­ding

Bref his­to­rique d’édition

Quinn, Shadow and Light, couverture du premier volume paru en 1998 dans la collection Amerotica
Quinn, Sha­dow and Light, cou­ver­ture du pre­mier volume paru en 1998 dans la col­lec­tion Amerotica

Vous aurez com­pris que je consi­dère Sha­dow and Light – ou Ombre & Lumière dans sa tra­duc­tion fran­çaise – comme un chef d’œuvre de l’é­ro­tisme lit­té­raire inter­na­tio­nal. On s’é­tonne d’au­tant plus de devoir consta­ter, à vou­loir ras­sem­bler les infor­ma­tions dis­po­nibles sur la Toile, que la tâche est bien plus ardue que ce que l’on aurait pu ima­gi­ner. Les infor­ma­tions sont éparses et par­fois même contra­dic­toires, l’his­to­rique des édi­tions suc­ces­sives étant loin d’être éta­bli. Voi­ci ce que j’ai trouvé :

Tout com­mence avec une pre­mière édi­tion de Sha­dow and Light, en 1998, sous le label Ame­ro­ti­ca, une col­lec­tion de romans gra­phiques de chez l’é­di­teur amé­ri­cain NBM.

Ensuite, l’a­ven­ture conti­nue, de façon inter­mit­tente, dans la revue éro­tique Sizzle, lan­cée par la même mai­son en 1999. Le pre­mier numé­ro annonce, sur la cou­ver­ture : « a new SHADOW AND LIGHT sto­ry ! ». Selon le résu­mé four­ni par le site Comic Vine il s’a­git de « Sha­dow & Light : The Arran­ge­ment, Part Two. Tou­jours selon le même site, des contri­bu­tions de Par­ris Quinn se trouvent ensuite dans les numé­ros 12 (numé­ro paru le 1 jan­vier 2001 avec sur la cou­ver­ture la men­tion : « Sha­dow & Light is back ! »), 13 (« Sha­dow & Light : glo­ry hole ») et 21 (paru le 1 jan­vier 2004, annon­çant sur la cou­ver­ture : « A New Sha­dow & Light, conte­nant, selon le résu­mé, l’é­pi­sode Sha­dow & Light : The Beach, part 2 »). Selon une cou­ver­ture dis­po­nible sur le site des édi­tions NBM consa­cré à la revue, Quinn y figure une nou­velle fois dans le numé­ro 65 (« Sha­dow & Light is back »), même si, bizar­re­ment, la cou­ver­ture pré­sente sur Comic Vine, en tous points pareille, ne l’in­dique pas.

À lire :
Thalia Devreaux, Chaudes vacances à Cuba

À côté des publi­ca­tions inter­mit­tentes dans Sizzle, la publi­ca­tion en volume se pour­suit, et le 1er février 1999, NBM lance Sha­dow and Light volume 2, sui­vi par les volumes 3 et 4 en 2000 et 2002 respectivement.

En 2009, Dyna­mite acquiert les droits pour l’é­di­tion fran­co­phone et entame la publi­ca­tion des volumes 1 à 5, pro­jet qui se ter­mine en 2014. C’est à cette occa­sion que Dyna­mite, sou­cieux de pro­lon­ger l’a­ven­ture, pro­pose à NBM de cofi­nan­cer un volume sup­plé­men­taire, volume qui paraî­tra simul­ta­né­ment, deux ans plus tard, aux États-Unis et en France. Ombre & Lumière, c’est donc à pro­pre­ment par­ler un voyage au long cours qui s’é­tend sur dix-huit ans et sur deux conti­nents.[8]Mer­ci à Nico­las Car­te­let, des édi­tions La Musar­dine, de m’a­voir four­ni ces ren­sei­gne­ments.

L’é­di­tion éro­tique d’outre-mer- fin de parcours ?

En guise de conclu­sion, per­met­tez-moi quelques mots à pro­pos d’un phé­no­mène qui semble se géné­ra­li­ser de l’autre côté de l’At­lan­tique. Mais est-ce qu’on est à l’a­bri de tels phé­no­mènes dans notre vieux monde ? Vous avez pu, en lisant cet article et en sui­vant les liens pro­po­sés, consta­ter la qua­li­té du tra­vail four­ni par Quinn, un artiste que j’ai décou­vert très récem­ment à tra­vers mes expé­di­tions lit­té­raires – une lacune de plus de vingt ans mine de rien… On ne sau­rait assez louer le tra­vail des édi­teurs qui offrent aux artistes – que ceux-ci soient auteurs, illus­tra­teurs, des­si­na­teurs ou scé­na­ristes – la pos­si­bi­li­té de pour­suive leurs par­cours. Dont cer­tains les mènent autour de la pla­nète, vers de loin­taines contrées. Ima­gi­nez donc mon désar­roi quand j’ai appris que NBM, l’é­di­teur qui a lan­cé Quinn sur son par­cours d’é­ro­to­graphe, a arrê­té l’é­di­tion éro­tique en 2018 :

L’a­ver­tis­se­ment des édi­tions NBM de mettre fin à sa ligne éro­tique Eurotica.

Je n’en aurais sans doute pas par­lé ici si je ne me sou­ve­nais pas de l’in­ter­view accor­dée par Rebec­ca à Dyna­mite où celle-ci affirme à pro­pos de son propre édi­teur, Fan­ta­gra­phics, que « l’équipe de Fan­ta­gra­phics a chan­gé son orien­ta­tion édi­to­riale — et ses inté­rêts pour l’érotisme. »[9]Inter­view : Rebec­ca, créa­trice des Des­pe­rate Hou­se­wives, Pro­pos recueillis par Chris­tian Mar­mon­nier en mai 2015. Savoir d’i­ni­tiée ? Pres­sen­ti­ment ? Quoi qu’il en soit, Fan­ta­gra­phics a déci­dé, quelques mois à peine après la publi­ca­tion de l’in­ter­view de Rebec­ca, de mettre fin à sa col­lec­tion éro­tique Eros Comix, en 2016, vingt-cinq ans après l’a­voir lancée.

Que pen­ser d’un pays où quelques-uns des plus grands por­no­graphes ont pu trou­ver des édi­teurs et où le por­no est pas­sé à l’é­tat de légende dans les stu­dios de la Cali­for­nie ? Et où, ensuite, a pu se pro­duire un Nip­ple­gate ? Fran­che­ment, une femme montre un bout de téton devant les camé­ras – que ce soit une pro­vo­ca­tion cal­cu­lée ou un acci­dent – et une nation entière com­mence à hyper-ven­ti­ler ? N’est-ce pas là comme un memen­to qui indique le début de cette pente où, depuis, la liber­té glisse vers l’a­bîme où la cen­sure l’at­tend en fin de par­cours pour la dépecer ?

Quoi qu’il en soit, cet article consa­cré à Quinn et à son excel­lente série Ombre & Lumière n’est pas l’en­droit pour pous­ser plus loin des inter­ro­ga­tions à pro­pos d’un phé­no­mène inquié­tant, sur­tout en ce qui concerne l’im­pli­ca­tion des grands dis­tri­bu­teurs à l’é­chelle mon­diale tels que Google et Ama­zon, mais je ne pou­vais décem­ment pas­ser à côté d’une ten­dance qui menace d’ap­pau­vrir la lit­té­ra­ture en des­sé­chant la créa­ti­vi­té à sa source.

Mais je ne vou­drais quand même pas ter­mi­ner cet article ins­pi­ré par un artiste aus­si remar­quable que Par­ris Quinn sur une note aus­si néga­tive. D’un côté. Mais comme, de l’autre, je ne sais pas si je peux vous annon­cer la nou­velle, je me contente de vous inci­ter à venir han­ter un peu plus sou­vent que d’ha­bi­tude le repaire des édi­tions Dyna­mite, disons vers la fin octobre, début novembre. Vous ris­que­rez d’y tom­ber sur une nou­velle ini­tia­tive, après celle qui, en 2016, a abou­ti à la publi­ca­tion du tome 6 d’Ombre & Lumière quinze ans après les pre­miers volumes, une ini­tia­tive donc de cet édi­teur pres­ti­gieux pour don­ner un nou­vel élan à l’œuvre de Quinn en ren­dant ses albums acces­sibles aux lec­teurs avides de décou­vrir un uni­vers tiraillé entre la rete­nue des crayons et la trans­gres­sion des protagonistes.

Vous trou­ve­rez La Plage répar­tie sur plu­sieurs volumes d’Ombre & Lumière :

Tra­duc­tion fran­çaise :
La Plage (Deuxième par­tie)
In : Ombre et Lumière, tome 5
Dyna­mite
ISBN : 9782362340666 

The Beach (Part three)
In : Sha­dow & Light, Volume 3
NBM Publi­shing
ISBN : 9781681120409 

Ver­sion ori­gi­nale :
Sha­dow & Light, The Beach parts 1 and 2
NBM Publi­shing
ASIN : B015M9SRGM

Réfé­rences

Réfé­rences
1 D’a­près la des­crip­tion four­nie par l’é­di­teur sur son site.
2 Dans la ver­sion fran­çaise, la deuxième par­tie se trouve, curieu­se­ment, dans le tome 5 d’Ombre & Lumière.
3 Selon la des­crip­tion qui, sur le site d’A­me­ro­ti­ca, accom­pagne la maquette du tome 2 de Sha­dows & Light
4 Page de pré­sen­ta­tion d’Ombre & Lumière 6 sur 7switch.
5 « Leurs his­toires, déclare l’auteur, sont véri­diques ; il n’y a que les noms qui ont été chan­gés « pour pro­té­ger les pas-si-inno­centes-que-ça. » Toutes ces femmes pré­tendent, dans un ins­tant d’auto-surprise, de « va savoir ! », de clar­té, qu’un tel com­por­te­ment ne leur res­semble pas du tout. », Robert Edi­son San­di­ford, Quinn the confes­sor, paru le 30 mai 2014 sur NBM Eurotica.
6 Selon la numé­ro­ta­tion dans la ver­sion ori­gi­nale américaine
7 « Je les mis en posi­tion, m’ins­tal­lai sur la table, enfon­çai son visage dans ma chatte et enta­mai une série d’or­gasmes en l’o­bli­geant de me bouf­fer tan­dis que les gar­çons conti­nuèrent à bran­ler leurs superbes bites. », Par­ris Quinn, The Beach, part three, p. 25
8 Mer­ci à Nico­las Car­te­let, des édi­tions La Musar­dine, de m’a­voir four­ni ces renseignements.
9 Inter­view : Rebec­ca, créa­trice des Des­pe­rate Hou­se­wives, Pro­pos recueillis par Chris­tian Mar­mon­nier en mai 2015.
Dessin d'une femme nue debout, vue de profil. Elle tient un gode dans la main droite qu'elle est en train de s'introduire dans le vagin.
Dessin réalisé par Sammk95