Lau­rence H., J’ex­hi­bais ma copine dans un club de naturistes

Avant d’en­trer dans le détail, per­met­tez-moi d’af­fir­mer, sur un ton qui se veut jubi­la­toire, que ceci – et ce mal­gré un titre des plus indi­gestes et qui en plus n’a fran­che­ment rien à voir avec l’in­trigue – est sans aucun doute le texte par­fait pour illus­trer des vacances réus­sies ! Deux ado­les­centes com­plices en bord de mer, le soleil au ren­dez-vous, une ren­contre impré­vue, libé­ra­tion pro­gres­sive des mœurs qui s’ac­com­pagne d’une liber­té ves­ti­men­taire, la décou­verte de la sexua­li­té et des plai­sirs de l’ex­hi­bi­tion. Et pour­tant, rien de gran­diose là-dedans, aucun évé­ne­ment capable de faire la Une de n’im­porte quel jour­nal, juste le quo­ti­dien d’un été dont on se sou­vien­dra des décen­nies plus tard, l’ex­tra­or­di­naire des vies sur la ligne de départ, à l’o­rée de l’âge adulte, le soup­çon de ce que peut être la liber­té, sans savoir encore ce que seront les cor­vées, conden­sé d’une joie de vivre dont le seul hori­zon est la ligne blanche qui sépare, dans une cha­leur vibrante, la mer du ciel, épa­nouis­se­ment d’une beau­té qui se découvre et qui s’as­sume – et qui part, pleine de confiance, à la conquête de la vie.

Le récit com­mence tout en dou­ceur, mise en place des plus inno­centes, deux ados en train de s’é­pa­nouir, au seuil de la vie adulte, près d’in­té­grer l’u­ni­ver­si­té et la liber­té des années estu­dian­tines. Le lec­teur avide de voir les pro­ta­go­nistes pas­ser à l’acte doit se conten­ter – pen­dant trois cha­pitres – de par­ties de bain de soleil « au natu­rel », et d’une petite séance bien inno­cente de matage, des tech­ni­ciens d’EDF tom­bant à l’im­pro­viste sur les jeunes beau­tés qui se croyaient seules avec les rayons de soleil sur leurs fesses. L’au­trice (Le sexe de la per­sonne à l’o­ri­gine de ce texte étant indi­qué par le choix d’un pré­nom fémi­nin comme pseu­do­nyme, je tiens à gar­der l’illu­sion et refuse de me lais­ser ten­ter par des spé­cu­la­tions liées à l’en­tre­jambe.) réus­sit pour­tant à don­ner un aper­çu de ce que sera un des prin­ci­paux sujets du roman, à savoir l’ex­hi­bi­tion, et j’ose affir­mer que même le plus impa­tient des lec­teurs sera conquis par le charme que Lau­rence H. a su injec­ter dans les moindres gestes des jeunes femmes.

À lire :
Mark Golding et Belinda Mosse, Sex on the beach

Ensuite, c’est le véri­table départ des vacances, Lau­rence – la nar­ra­trice à la pre­mière per­sonne – ayant le bon­heur de pas­ser deux semaines entre plage et cam­pagne, dans la ferme de son oncle. C’est là qu’elle retrouve sa cou­sine, Valé­rie, com­plice de ses esca­pades futures, qui se montre assez entre­pre­nante pour une ado de 16 ans. Entre cam­ping sau­vage et plage (tex­tile d’a­bord, natu­riste ensuite), c’est la décou­verte des joies du natu­risme, de la nudi­té inté­grale et des plai­sirs de l’ex­hi­bi­tion, les deux pro­ta­go­nistes assu­mant le rôle de voyeuses atti­trées avec brio, inci­tant les couples qui se pré­sentent devant elles à se dépas­ser. Et comme on est en pré­sence ici de deux ado­les­centes, vierges toutes les deux, il convient de sou­li­gner que l’au­trice réus­sit à bien déga­ger la fas­ci­na­tion du sexe, sa part de mys­tère si dif­fi­cile à entre­te­nir au fil des années, des habi­tudes et des désen­chan­te­ments, en se ser­vant de ces deux ado­les­centes, de leur avi­di­té de décou­vertes, de leurs regards inno­cents et de leurs idées fraîches, arti­fice génial pour mon­trer à l’œuvre le charme cru des corps en ébul­li­tion, de la péné­tra­tion et de la lente mon­tée du plai­sir. On a l’ha­bi­tude de trou­ver des mots et des gestes bien plus crus dans les titres de chez Média 1000, mais c’est sans doute l’oc­ca­sion de mesu­rer toute la lar­geur du champ de ce qui se qua­li­fie comme pornographique.

Lau­rence H. montre, au fur et à mesure des ren­contres et des expé­riences qui s’ac­cu­mulent, qu’elle maî­trise le voca­bu­laire de la séduc­tion. En même temps, on découvre qu’elle ne manque pas d’hu­mour non plus, impo­sant à ses per­son­nages – et à ses lec­teurs avec eux – un chan­ge­ment radi­cal de décor où notre pro­ta­go­niste se ver­ra contrainte à assu­mer les poses les plus lubriques, à mille lieues pour­tant de toute sen­sua­li­té. Et c’est pré­ci­sé­ment cet épi­sode-ci qui sera cou­ron­né par le dépu­ce­lage tant atten­du de Lau­rence. Une autre occa­sion pour Lau­rence H. d’é­ta­ler sa maî­trise, quand il s’a­git de créer des ambiances.

À lire :
Manuel Blanc, Carnaval

Si vous cher­chez encore une lec­ture pour accom­pa­gner vos bains de soleil – ou si vous devez encore patien­ter avant de pou­voir en pro­fi­ter – je vous conseille ce roman tout à fait déli­cieux, avec son excel­lente mise en bouche des trois pre­miers cha­pitres, les deux ado­les­centes au milieu du jar­din, pro­fi­tant du soleil – et des regards – sur leurs corps entiè­re­ment dénu­dés, sui­vie du récit plus cor­sé des vacances en bord de mer qui réservent à Lau­rence et à sa cou­sine des défis autre­ment plus excitants.

Et féli­ci­ta­tions à Média 1000 d’a­voir su trou­ver une autrice telle que Lau­rence H. dont le roman, mal­gré son titre peu appé­tis­sant, est appe­lé à res­ter un des meilleurs sou­ve­nirs de la sai­son 2017 des Lec­tures esti­vales.

Pour ter­mi­ner, je me per­mets de citer la belle Lau­rence, pro­ta­go­niste coquine de J’ex­hi­bais ma copine dans un club de natu­ristes, qui trouve les mots qui méritent d’être mis en exergue sur la série entière des Lec­tures esti­vales :

Les vacances d’été devraient durer toute l’année… [1]Cha­pitre IX

Lau­rence H.
J’ex­hi­bais ma copine dans un club de natu­ristes
Média 1000
9782744809842

Réfé­rences

Réfé­rences
1 Cha­pitre IX
Dessin d'une femme nue debout, vue de profil. Elle tient un gode dans la main droite qu'elle est en train de s'introduire dans le vagin.
Dessin réalisé par Sammk95