Gian­lu­ca Maco­ni, La nuit du Glo­riole (Connie La Bar­bare, t. I)

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Et voi­ci une bande des­si­née qui com­mence par une réin­ter­pré­ta­tion de la Genèse, emprun­tant à Moïse jus­qu’à la for­mule célèbre du début : « Au com­men­ce­ment ». Sauf que Dieu y est rem­pla­cé par le « tout » et qu’à la place de la divi­ni­té, ce sont l’a­mour et le sexe (divins tous les deux, évi­dem­ment !) qui d’a­bord créent l’u­ni­vers et ensuite le peuplent de toutes sortes de créa­tures, dans le sens le plus large pos­sible. Tout est ani­mé, tout baise – les pla­nètes, les mon­tagnes, les ani­maux et, bien sûr, les humains :

Gianluca Maconi, La création, p. 12 - 13 du t. 1 de Connie la Barbare
La créa­tion selon Gian­lu­ca – au com­men­ce­ment fut la Baise (Connie la Bar­bare, t.1, p. 12 – 13).

Une belle idée, ces mon­tagnes qui baisent et se culbutent1. Ima­gi­nez un peu les trem­ble­ments de terre que cau­se­raient de telles orgies de pierre et de roc ! Je dois avouer que j’ai rare­ment vu une aus­si belle mise en scène de l’acte créa­teur et de l’i­dée de la nature animée.

Mal­heu­reu­se­ment, les choses n’en sont pas res­tées là, et la volon­té de pos­ses­sion – le péché ori­gi­nel dans l’u­ni­vers de Gian­lu­ca – est venue rem­pla­cer l’a­mour. Et voi­ci que s’a­mène, à peine quelques pages plus loin, une bande de bar­bares avec la belle idée de vio­ler une troupe de jeunes femmes venues se ras­sem­bler en pleine nature pour entendre le récit de la – créa­tion. Et c’est le moment savam­ment ame­né par l’au­teur où notre héroïne fait son appa­ri­tion fra­cas­sante. Ou plu­tôt mas­sa­crante, comme les bar­bares sus-men­tion­nées ne tar­de­ront pas à l’ap­prendre à leurs dépens.

D’a­près ce que j’ai pu trou­ver sur la toile, Gian­lu­ca Maco­ni n’a pas d’an­té­cé­dents éro­tiques, Connie La Bar­bare étant sa pre­mière excur­sion dans le domaine de pré­di­lec­tion de votre ser­vi­teur. Avant Connie, on trouve chez Gian­lu­ca plu­tôt des elfes et autres créa­tures fée­riques peu­plant les uni­vers de fan­ta­sy de séries aux­quelles il col­la­bore, comme Elfes ou Elya, les brumes d’As­cel­tis. Avec quelques notables excep­tions qui l’ont conduit, en 2005, chez l’é­di­teur padouan Bec­co Gial­lo où il a pu réa­li­ser, trente ans après la mort du célèbre écri­vain et réa­li­sa­teur, un pro­jet consa­cré au mys­tère autour de l’as­sas­si­nat de Paso­li­ni : Il delit­to Paso­li­ni avant de le faire pas­ser chez Hazard Edi­zio­ni où il a signé, en 2010, le Requiem élec­trique, une BD bio­gra­phique consa­crée à Jim­my Hen­drix. Et si vous vou­lez avoir une idée de son des­sin en géné­ral, vous pou­vez consul­ter les 258 images ras­sem­blées sur sa page Devian­tArt. Où il n’a tou­te­fois plus rien publié depuis 2016.

À lire :
Igor & Boccère, Clémentine à la plage
Gianluca Maconi, Connie la Barbare. t. 1, p. 29
La Mère Supé­rieure du couvent en train de jouir sous la langue experte de Connie (p. 29)

Connie – petite série de trois volumes dont la publi­ca­tion a débu­té en 2022 chez Tabou – est donc une pro­chaine étape dans l’œuvre de Maco­ni. À moins d’être une sorte de jar­din secret ou d’é­chap­pa­toire lui per­met­tant de don­ner libre cours à une ima­gi­na­tion appa­rem­ment en pleine effer­ves­cence. Parce que les aven­tures rocam­bo­lesques de cette petite bar­bare ne font pas seule­ment ban­der, mais sur­tout écla­ter d’un grand franc rire libé­ra­teur. Rien que cette petite phrase glis­sée par une des « moniales » à sa cama­rade qui, confron­tée aux ori­gines nor­diques de Connie, la désigne comme une « barbare » :

« On dit « En voie de civi­li­sa­tion » ! »2

C’est tout sim­ple­ment hila­rant. Et pen­dant qu’on conti­nue la lec­ture avec tou­jours un grand sou­rire, on se laisse empor­ter par la sen­sua­li­té de la nuit qui emporte Connie et ses nou­velles cama­rades dans une débauche les­bienne qui ne laisse rien dési­rer au plus fol ama­teur de gali­pettes au fémi­nin. Ou plu­tôt « mouillettes » comme dira Connie. Et que dire de ces femmes dont Maco­ni sait entou­rer sa bar­bare ? La beau­té exquise et l’o­pu­lence des formes leur confèrent un charme tout sim­ple­ment irré­sis­tible. Impos­sible de croire que Maco­ni ait sor­ti cela de nulle part, mais je n’ai rien trou­vé qui puisse pré­pa­rer une telle débauche de sen­sua­li­té et de joie las­cive. Il est donc d’au­tant plus éton­nant de consta­ter la per­fec­tion de ces sédui­santes créa­tures et des pos­tures indé­centes qu’il leur fait prendre afin de conduire les lec­trices et les lec­teurs à une sorte d’ex­tase virtuelle.

Mais on ne peut assez sou­li­gner le fait que, si on y baise beau­coup et avec grande effu­sion de tous les liquides que les corps peuvent offrir, on y rigole aus­si, et le rire de Connie n’est pas seule­ment char­mant, mais sur­tout conta­gieux. Et elle a le secret pour pro­fi­ter des situa­tions où la quête de l’a­ven­ture la conduit. La grotte d’une magi­cienne mal­veillante est gar­dée par une troupe de trolls ? Et si on se ser­vait de son cul pour les dis­traire ? Et en même temps en tirer une bonne grosse dose de plaisir ?

À lire :
Atilio Gambedotti, Cercle intime

Cela ne sert à rien de vous don­ner le détail de ses aven­tures lubriques. Sachez seule­ment qu’il y a au menu, outre les trolls déjà men­tion­nés, une duchesse en détresse, un petit comte auquel elle prête main forte et un couple d’au­ber­giste qui a des idées bien par­ti­cu­lières pour pro­fi­ter de la fin du monde. Qui s’an­nonce suite à un cer­tain rituel, dans lequel la duchesse Yolande de Lune­fen­due est cen­sée jouer le rôle principal.

Je pense que je vous ai fait venir assez d’eau à la bouche pour vous convaincre de vous rendre dans votre bou­tique de confiance (peu importe que celle-ci soit vir­tuelle ou ana­logue) et de dépen­ser vos sous afin de pou­voir pro­fi­ter à votre rythme de cette bar­bare ravis­sante et des aven­tures lubriques dans les­quelles elle a le chic de s’in­tro­duire. Je suis sûr que vous ne regret­te­rez pas d’être aux pre­miers rangs pour assis­ter à l’ex­plo­sion de sen­sua­li­té, de créa­ti­vi­té et de bonne humeur que le Sieur Maco­ni fait défer­ler sur ce bon Royaume de France.

Gian­lu­ca Maco­ni
La nuit du Glo­riole (Connie La Bar­bare, t. I)
Tabou Édi­tions
ISBN : 978–2359547283

  1. Vous aurez consta­té qu’il y a comme une cou­pure au bon milieu de l’i­mage. Ceci est dû au fait qu’elle a été recons­ti­tuée par les efforts de votre ser­vi­teur qui a eu le bon­heur de pou­voir suivre une for­ma­tion aux outils de mani­pu­la­tion d’i­mages comme Pho­to­shop ou le Gimp. Et le résul­tat n’est pas le témoi­gnage de mes connais­sances médiocres en la matière, mais plu­tôt d’une mani­pu­la­tion mal­adroite quant à la mise en page numé­rique du volume. Où la planche a été cou­pée en deux avant d’être repar­tie sur deux pages qui ne s’af­fichent pas ensemble dans un lec­teur PDF. Ce qui est assez dom­mage. Si vous vou­lez avoir une impres­sion de la qua­li­té ori­gi­nale, cf. le bel article signé Charles-Louis Detour­nay paru chez ActuaBD le 12 juin 2023. ↩︎
  2. Gian­lu­ca Maco­ni, La nuit du Glo­riole, p. 24 ↩︎
Dessin d'une femme nue debout, vue de profil. Elle tient un gode dans la main droite qu'elle est en train de s'introduire dans le vagin.
Dessin réalisé par Sammk95