En-tête de la Bauge littéraire

Golov, Belle de plage

Après l’an­née mer­dique qui vient de se clore – et que votre ser­vi­teur voue de tout cœur aux gémo­nies, – il faut pla­cer l’an­née nou­velle sous de meilleures aus­pices. Et comme vous êtes ici dans l’antre du San­glier et que vous connais­sez sans doute mon appé­tit pour la chair fraîche illu­mi­née par le soleil esti­val, quelle meilleure façon de s’y prendre qu’en cédant la « parole » au Maître incon­tes­té de la beau­té dans ce qu’elle a de plus simple et de plus ravis­sant ? Je parle évi­dem­ment du Maître natu­riste & nihi­liste, Golov, qui, blot­ti au fin fond de ses terres cata­lanes, manie un pin­ceau qui conti­nue à séduire votre ser­vi­teur depuis la pre­mière fois que j’ai mis les yeux sur ses Belles de plage qui se pro­duisent dans les criques de la Côte ver­meille, éta­lant leurs chairs sous l’astre qui illu­mine un Midi de conte de fée, un bout de para­dis que même la stu­pi­di­té qui sévit à quelques pas de là ne sau­rait dura­ble­ment souiller.

Quand la beau­té part en guerre…

Mais n’ou­bliez pas, chers amis, que la beau­té peut non seule­ment ins­pi­rer du cou­rage, mais rejoindre voire gui­der le com­bat ! Qui serait d’ailleurs mieux pla­cés pour le savoir que vous autre Fran­çais qui comp­tez dans vos rangs un Dela­croix qui a su faire de sa Liber­té une icône de la beau­té au com­bat ? Parce que la beau­té à laquelle je pense aujourd’­hui, ce n’est pas celle qui fait sali­ver dans l’es­poir d’ob­te­nir un petit quart d’heure de plai­sir, mais bien pré­ci­sé­ment celle qui nous ins­pire une si farouche envie de nous battre. Et c’est là-des­sus que j’ap­porte mon grain de sel d’âme teu­tonne en invo­quant le sou­ve­nir de ces femmes ger­ma­niques qui, en expo­sant leurs poi­trines, ont su rani­mer le cou­rage défaillant de leurs com­pa­gnons en train de recu­ler devant les légion­naires. Tacite lui-même nous ren­seigne sur cette habi­tude dans le hui­tième cha­pitre de son opus­cule consa­cré à la des­crip­tion de la « Ger­ma­nie », de ses peuples et de leurs mœurs :

Memo­riae pro­di­tur quas­dam acies incli­na­tas iam et labantes a femi­nis res­ti­tu­tas […] obiec­tu pec­to­rum1

J’aime ima­gi­ner que la vue de ces chairs opu­lentes – et com­ment ima­gi­ner une femme ger­ma­nique à la poi­trine plate ? – ins­pi­rait un cou­rage à la hau­teur du spec­tacle : farouche, san­gui­nolent et irré­sis­tible. Celui-là même qu’il nous faut aujourd’­hui pour faire face à la conne­rie ambiante. Et qui mieux invo­quer que le Maître lui-même, Golov, qui a mis en vente, à l’oc­ca­sion de ses anti-soldes de jan­vier, un de ses ravis­sants des­sins que je viens d’ac­qué­rir et que j’ai­me­rais vous expo­ser ici. Dans l’es­poir, évi­dem­ment, de vous ins­pi­rer le cou­rage néces­saire pour per­sis­ter dans le combat.

Golov, Belle de plage
Maître Golov, Des­sin 480 aka Belle de plage

Et tant que vous y êtes, n’ou­bliez pas d’ad­mi­rer le savoir-faire du Maître qui a su figer, dans une pose tout aca­dé­mique, une beau­té à vous cou­per le souffle, une belle gosse qui s’ex­pose avec l’é­vi­dence d’une Déesse que per­sonne n’a besoin de ras­su­rer, et dont la car­na­tion repro­duit la chair dans ce qu’elle a de plus res­plen­dis­sante. J’ai hâte d’en­fin avoir l’o­ri­gi­nal entre les pattes afin d’in­ter­ro­ger de près un pro­cé­dé qui pro­duit de si beaux résul­tats avec une si belle régu­la­ri­té.

  1. « On a vu, dit-on, des armées chan­ce­lantes et à demi rom­pues, que des femmes ont rame­nées à la charge […] en pré­sen­tant le sein aux fuyards » Taci­tus, De Ger­ma­nia, chap. 8. ↩︎