Eros­to, Wee­kend au soleil

Eros­to – voi­ci donc un nou­vel auteur (auteur, autrice, col­lec­tif, intel­li­gence arti­fi­cielle ayant pété des plombs – je n’en sais stric­te­ment rien) dans la Bauge lit­té­raire. Un auteur qu’il est dif­fi­cile d’é­vi­ter quand on a l’ha­bi­tude, comme moi, de se pro­me­ner régu­liè­re­ment – et lon­gue­ment – entre les éta­gères vir­tuelles de chez Ama­zon. Un auteur avec à son actif une ving­taine de titres avec entre autres des joyaux comme Je lui ai offert mes trous pour mes dix-huit ans ! ou Body pain­ting anal. Avouez qu’il est dif­fi­cile de faire mieux pour s’at­ti­rer les égards de la Bête habi­tuée à rôder du côté des plai­sirs peu avouables et à fré­quen­ter des gens ayant l’ha­bi­tude de traî­ner dans la boue non seule­ment leurs per­son­nages mais jus­qu’à leur propre répu­ta­tion. Si je ne sais pas trop vous expli­quer com­ment j’ai pu faire pour évi­ter de vous en par­ler jus­qu’i­ci, vous com­pren­drez faci­le­ment qu’un titre comme Wee­kend au soleil, avec tout ce qu’il sous-entend de plai­sirs esti­vaux, n’a pu échap­per à l’at­ten­tion du San­glier qui a mis ses pattes des­sus avec la ferme inten­tion de le faire entrer dans l’é­di­tion 2019 de ses Lec­tures esti­vales. Et voi­ci donc un texte où, mal­gré son titre tel­le­ment sage à côté de ce que cet auteur a l’ha­bi­tude de vous sor­tir, vous devi­ne­rez faci­le­ment des abîmes de chairs en extase, le tout sous un soleil d’é­té aus­si sau­vage que les envies que celui-ci fait naître.

Erosto - son compte Twitter
Eros­to – son compte Twitter

Ima­gi­nez-vous donc près du week-end du 14 juillet, avec la tem­pé­ra­ture qui monte et les foules près d’être lâchées sur le lit­to­ral dont une popu­la­tion aus­si bario­lée qu’as­soif­fée de détente et de plai­sir inves­ti­ra les plages pour trans­for­mer celles-ci en défi­lé de mode bon mar­ché et en étal de bou­cher, un décor appe­lé à deve­nir, le temps de quelques semaines, le théâtre de tous les rêves et l’a­rène de tous les espoirs et de tous les déchaî­ne­ments. Et voi­ci donc Eros­to qui se sai­sit de ce beau pré­texte pour mettre en scène l’his­toire d’un ménage à trois qui se forme à l’im­pro­viste, grâce au hasard qui arrange par­fois si bien les choses, et qui emmène les lec­teurs – trans­for­més en mateurs le temps de dégus­ter cette cin­quan­taine de pages – dans les cou­lisses d’une joie de vivre qui ne se refuse abso­lu­ment rien.

Voi­ci donc plan­té le décor pour accueillir nos pro­ta­go­nistes, Éric et Sabri­na, un couple de bons vivants bien­tôt rejoint par la belle Corinne, la plan­tu­reuse meilleure amie de Sabri­na, qui a le mal­heur de s’at­ti­rer les mecs les plus nuls et a donc grand besoin de renouer avec le plai­sir tel qu’il se vit sous le soleil. Et comme Éric et Sabri­na sont près de par­tir en week-end pour célé­brer l’é­té et les joies du couple, quoi de plus facile que d’en pro­fi­ter pour embar­quer la copine en détresse ? S’il est vrai qu’É­ric a sur le cœur un pro­jet bien pré­cis pour ce qui est de Sabri­na qu”

il espère pou­voir […] prendre par­tout, et pas seule­ment au niveau des pièces de la mai­son, mais par­tout en elle. [1]Eros­to, Wee­kend au soleil – His­toire éro­tique pour adultes, non cen­su­rée, fan­tasme sexe à plu­sieurs, trio­lisme, plai­sir saphique les­bienne, Édi­tion du Kindle, empla­ce­ment 16

il ne tar­de­ra pour­tant pas à se lais­ser convaincre par les argu­ments avan­cés par sa copine et par les charmes de la belle Corinne. Après tout, le moyen de résis­ter à un tel spectacle ?

Corinne venant juste d’arrivée [sic !] au bord de la pis­cine parait sur­prise et reste suf­fi­sam­ment long­temps hors de l’eau pour qu’Éric ait bien le temps de voir ses courbes, ses gros seins dar­dés vers le ciel, son mont de Vénus com­plè­te­ment épi­lé et ses longues jambes gal­bées. [2]Eros­to, Wee­kend au soleil, Édi­tion du Kindle, empla­ce­ment 542

Trois jeunes gens sous le soleil, la plu­part du temps légè­re­ment – voire pas du tout – vêtus, une proxi­mi­té faci­li­tée par le magné­tisme des corps qui n’as­pirent qu’à entrer en contact pour mieux s’ex­plo­rer, la fougue et l’in­sou­ciance de la jeu­nesse exa­cer­bées par l’am­biance esti­vale – pas besoin de vous faire un des­sin pour vous faire com­prendre que le cap est très vite fran­chi et que le rap­pro­che­ment entre les trois pro­ta­go­nistes va bien plus loin que le fait de sau­ter à poil dans une pis­cine. Et après tout, n’est-ce pas là tout ce qu’on demande à un titre cen­sé pré­pa­rer – ou accom­pa­gner – les vacances ? Du soleil, des corps en ébul­li­tion, des bites dres­sés et des ori­fices bien lubri­fiés, le tout épi­cé par une bonne grosse dose d’in­dé­cence ? J’au­rais ten­dance à répondre à ma propre ques­tion par l’af­fir­ma­tive, mais je parie que vous vous êtes déjà ren­dus compte d’une petite réserve. Disons donc : « Oui, mais. »

À lire :
Marco Nizzoli, Un bel été

Mal­heu­reu­se­ment, le petit pas­sage cité plus haut – mal­gré la sen­sua­li­té qui se dégage à sou­hait du spec­tacle décrit en vrai ama­teur de ce que le corps fémi­nin peut avoir d’at­ti­rant – a de quoi aus­si dis­sua­der l’a­mi d’un texte bien com­po­sé et d’une gram­maire maî­tri­sée. Vous com­pre­nez bien sûr que je n’en ferais pas grand cas s’il s’a­gis­sait ici d’un cas iso­lé, mais comme c’est plu­tôt un phé­no­mène géné­ra­li­sé et qu’on trouve des coquilles, des pas­sages mal­ha­biles et des mises en page approxi­ma­tives un peu par­tout, il s’a­git ici d’une épreuve à sur­mon­ter, et je ne repro­che­rais à per­sonne de ter­mi­ner la lec­ture pour de bon avant même d’a­voir pu assis­ter aux spec­tacles qui se pré­parent. J’es­père quand même que le soleil a le même effet sur vous que sur moi, qu’il vous ren­dra clé­ments et que vous par­don­ne­rez à l’au­teur de pré­fé­rer les joies de l’ex­tase sen­suelle à celles nées de la lec­ture et de l’ap­pli­ca­tion du Grevisse.

Tout est donc pour le mieux [ou presque] dans le monde de l’es­ti­vant par­fait, et le décor est – tout comme les per­son­nages – non seule­ment au ren­dez-vous, mais aus­si à la hau­teur des attentes : Une vil­la dans le Sud-Ouest près de la mer, une ville à côté dont les bou­tiques mettent à la dis­po­si­tion de nos vacan­ciers un stock riche­ment gar­ni de lin­ge­rie sexy, une pis­cine à l’a­bri des regards qui invite à adop­ter le natu­risme au moins le temps de la bai­gnade, un bar­be­cue Weber pour satis­faire aux palais exi­geants et aux pul­sions de l’homme des cavernes en même temps, une Méha­ri pour les dépla­ce­ments au grand air en style, le tout sous un ciel bleu où même l’o­rage s’ins­crit dans l’am­biance esti­vale, sur­tout quand celui-ci fait mon­ter de la terre les par­fums de l’été :

Il ne pleut plus dehors […] L’air se réchauffe, de la vapeur s’é­chappe de la terre déga­geant un léger nuage, une légère brume sen­tant bon le soleil, le sable et la pluie. [3]Eros­to, Wee­kend au soleil, empla­ce­ment 512

Tout y est, le voyage, le soleil, la pis­cine, la cha­leur, les gali­pettes, le bar­be­cue – un été comme tiré du conte de fée de l’es­ti­vant par­fait, mais l’au­teur n’ar­rive pas tou­jours à nous mettre dans l’am­biance, ça ne décolle pas. Encore heu­reux qu’E­ros­to nous four­nit aus­si la preuve de ce qu’il est quand même capable d’un éro­tisme qui. comme en pas­sant, met sous le charme jus­qu’au lec­teur le plus récal­ci­trant. Il n’y a qu’à relire le pas­sage où Sabri­na, par un geste aus­si sen­suel que décom­plexé, vient à bout des réti­cences de Corinne qui ne sait pas trop ce qu’elle doit faire des boules de gei­sha prê­tée par sa copine :

- qu’est ce que tu veux que j’en fasse ?

- Tu les enfile et c’est tout. Dépêche-toi et ensuite on part lui dit Sabrina.

- Mais…

- Allez, baisse ton short, glisse-toi ça dans le vagin et on décolle. Y a pas de mais.

- Attend je reviens alors.

- Non lui répond Sabri­na tout en se rap­pro­chant de sa copine. Un bai­ser sur la bouche, les mains sur le short. Sabri­na ouvre le short de sa copine, le baisse juste un peu, s’empare des boules et lui fourre dans le sexe d’un trait.

- Oh ! [4]Eros­to. Wee­kend au soleil – His­toire éro­tique pour adultes, non cen­su­rée, fan­tasme sexe à plu­sieurs, trio­lisme, plai­sir saphique les­bienne, Édi­tion du Kindle, empla­ce­ment 278. Comme je ne veux … Conti­nue rea­ding

Il y a dans ce texte d’im­por­tantes inéga­li­tés et on y trouve, à côté de ceux où le nar­ra­teur s’ar­rête amou­reu­se­ment aux détails [5]cf., à l’emplacement 452, le choix du thé pour « ces dames », des pas­sages où il fonce comme si le temps lui était conté, obsé­dé par un but qu’on ne devine pas tou­jours. Et si, d’un côté, la sen­sua­li­té est au ren­dez-vous grâce à quelques phrases et à quelques gestes tout simples :

- Et toi Éric, tu ne bois rien ? attends, je vais te ser­vir lui dit Corinne.
Elle boit une gor­gée de Cham­pagne et vient embras­ser Éric à pleine bouche. Celui-ci se laisse faire et appré­cie ce moment. [6]Eros­to. Wee­kend au soleil, Édi­tion du Kindle, empla­ce­ment 810

on tombe, peu après, sur des phrases comme celle-ci dont on ne sait trop s’il faut admi­rer le défi lan­cé comme un gant à la gueule de la lit­té­ra­ture ou s’il faut être embar­ras­sé à la place de l’auteur :

Les trois main­te­nant nus, les péné­tra­tions sont au ren­dez-vous. [7]Eros­to. Wee­kend au soleil, Édi­tion du Kindle, empla­ce­ment 840

Si Wee­kend au soleil n’est sans doute pas capable de satis­faire les attentes d’un épris de lit­té­ra­ture, l’au­teur réus­sit quand même à créer, sur cer­taines pages, une ambiance sacré­ment sen­suelle et bon enfant où les trois amou­reux – et c’est bien de cela qu’il faut qua­li­fier les pro­ta­go­nistes – laissent libre cours à leurs pas­sions et à leurs sen­ti­ments, le tout dans une ambiance esti­vale on ne peut plus par­faite. Mais le plus beau dans ce texte – et j’a­voue que je ne me suis pas atten­du à y trou­ver un côté pas­sion­nel et presque phi­lan­thrope – est sans doute le sen­ti­ment de bien­veillance mutuelle qui se dégage des rela­tions entre les pro­ta­go­nistes, une volon­té de par­tage et d’ou­ver­ture qui, le temps de quelques pages, peut faire rêver.

À lire :
À propos des "auteurs numériques"

Je pense avoir assez dit sur un texte que, mal­gré quelques remarques, j’ai­me­rais vous recom­man­der pour les heures que vous comp­tez pas­ser allon­gés sur vos ser­viette ou dans vos tran­sats. Je vous quitte donc en vous réser­vant le plai­sir de décou­vrir par vous-même la conclu­sion. Vous me direz si celle-ci est un peu trop ou si c’est par contre la chute idéale pour assu­rer le suc­cès des suites annoncées…

Digres­sion coquine – Eros­to, le site web

Erosto, le site Web (capture d'écran)
Eros­to, le site Web (cap­ture d’é­cran réa­li­sée le 16 juillet 2019)

Un mot avant de ter­mi­ner : à côté de ses acti­vi­tés d’au­teur, Eros­to anime aus­si un site web où il publie un assez grand nombre de textes mis à la dis­po­si­tion des inter­nautes. Je n’ai pas eu le temps d’al­ler au-delà des pre­mières impres­sions, mais je me per­mets quand même de signa­ler à mes lec­teurs cette source assez riche en diver­tis­se­ments. En plus des textes, le site abrite des fonc­tion­na­li­tés d’un site de ren­contres et – plus pro­saï­que­ment – « de cul », à l’in­ten­tion sans doute de celles et de ceux qui, échau­dés par les par­ties de jambes en l’air entre nos trois pro­ta­go­nistes, vou­draient se cher­cher des par­te­naires pour pas­ser du domaine de l’i­ma­gi­naire à celui du réel. À moins que ce soit plu­tôt dans un sou­ci, de la part de l’au­teur, d’ar­ron­dir les fins de mois en s’ou­vrant une source de reve­nus sup­plé­men­taires. Quoi qu’on puisse avoir des réserves sur les fonc­tion­na­li­tés « web­cam » – dis­po­nible en ver­sions « coquine » et « sexy » – et « ren­contre », il est tou­jours pos­sible de s’en tenir aux textes sans devoir céder aux ten­ta­tions supplémentaires.

Eros­to
Wee­kend au soleil
Ama­zon Media
ASIN : B07DLB9GMS

Réfé­rences

Réfé­rences
1 Eros­to, Wee­kend au soleil – His­toire éro­tique pour adultes, non cen­su­rée, fan­tasme sexe à plu­sieurs, trio­lisme, plai­sir saphique les­bienne, Édi­tion du Kindle, empla­ce­ment 16
2 Eros­to, Wee­kend au soleil, Édi­tion du Kindle, empla­ce­ment 542
3 Eros­to, Wee­kend au soleil, empla­ce­ment 512
4 Eros­to. Wee­kend au soleil – His­toire éro­tique pour adultes, non cen­su­rée, fan­tasme sexe à plu­sieurs, trio­lisme, plai­sir saphique les­bienne, Édi­tion du Kindle, empla­ce­ment 278. Comme je ne veux pas pas­ser pour un pédant, je renonce à signa­ler les fautes de gram­maire ou d’orthographe.
5 cf., à l’emplacement 452, le choix du thé pour « ces dames »
6 Eros­to. Wee­kend au soleil, Édi­tion du Kindle, empla­ce­ment 810
7 Eros­to. Wee­kend au soleil, Édi­tion du Kindle, empla­ce­ment 840
Dessin d'une femme nue debout, vue de profil. Elle tient un gode dans la main droite qu'elle est en train de s'introduire dans le vagin.
Dessin réalisé par Sammk95