En-tête de la Bauge littéraire

Alice Ade­not-Meyer, Piège dans les ruines

Au début et à la fin du récit, la flèche de la cathé­drale de Stras­bourg pointe son nez au-des­sus des toits de la capi­tale alsa­cienne. Par deux fois, Jeanne, l’hé­roïne du roman d’A­lice Ade­not-Meyer, fait ce tra­jet qui l’emmène de sa ban­lieue pari­sienne vers l’Est de la France, mais la jeune femme à bord du train, est-elle tou­jours la même ?

Piège dans les Ruines est un livre de jeu­nesse, et l’in­trigue part d’une des situa­tions clas­siques du genre : Une ado­les­cente est arra­chée à son uni­vers habi­tuel, plu­tôt de force que de gré, et doit aller à la ren­contre de per­sonnes et de situa­tions qu’elle n’ap­pré­cie pas for­cé­ment. Ce départ est bien enten­du un chiffre pour dési­gner l’a­dieu que nous sommes tous for­cés de dire à l’en­fance, pous­sés par le déve­lop­pe­ment impi­toyable de notre corps en pleine trans­for­ma­tion et de nos cer­veaux assié­gés par les hormones.

Après les pro­blèmes ini­tiaux d’u­sage et quelques dif­fi­cul­tés d’a­dap­ta­tion, Jeanne se découvre une cer­taine sen­si­bi­li­té pour les charmes légè­re­ment troubles du bel Élias, musi­cien aux doigts habiles, et le petit monde où elle évo­lue désor­mais s’en res­sent. Des sen­ti­ments qui naissent et peinent à se recon­naître, une rela­tion à l’é­tat embryon­naire, le bal­let des égos – tout cela aurait très bien pu gui­der les ados à tra­vers quelques semaines de vacances sans engen­drer de consé­quences autre­ment plus graves qu’un petit coup de blues à la gare de Stras­bourg, avant de mon­ter dans le train. Mais les voyous se chargent de chan­ger la donne. Sur fond de magouilles à l’ombre des Vosges, Jeanne et Élias vivront un véri­table voyage ini­tia­tique qui les fera connaître le pas­sage à tra­vers les ténèbres, au sein de la terre-mère, et ils en sor­ti­ront chan­gés. Comme quoi la méchan­ce­té et le mal ont leur place dans le monde, au même titre que l’a­mour et l’a­mi­tié, et la recon­nais­sance de cet état du monde, l’a­dieu aux bisou­nours, marquent la pro­gres­sion irré­mé­diable vers le monde des adultes dans lequel il fau­dra désor­mais vivre et dont il faut accep­ter les bons et les moins bons côtés, même si la ten­ta­tion de la mort peut, pen­dant de minus­cules ins­tants, créer l’illu­sion qu’on pour­rait y échapper.

À lire :
Rachid Santaki, Flic ou Caillera

Une écri­ture agréable, de belles des­crip­tions de pro­me­nades noc­turnes, une plon­gée dans la psy­ché d’une ado qui se cherche et qui ne com­prend pas tou­jours ce qui lui arrive. Un livre que je recom­mande for­te­ment mal­gré un petit défaut : trop peu de pages :-)

Adenot-Meyer, Piège dans les ruines

Alice Ade­not-Meyer
Piège dans les ruines
Édi­tions Kiro­gra­phaires
ISBN 978−2−8225−0116−3

Cré­dit pho­to­gra­phique :
La cathé­drale de Stras­bourg : Jona­than Martz

Une réponse à “Alice Ade­not-Meyer, Piège dans les ruines”

  1. Lu récem­ment, j’ai beau­coup aimé ce livre. J’ai éga­le­ment trou­vé l’é­cri­ture très agréable.