Alex Bleuet, Les Vacances de Lili

On n’est que le 3 jan­vier, et votre ser­vi­teur entre­prend de vous par­ler de l’é­té ? Et bien, si on se fie à l’a­dage des tour-ope­ra­tors comme quoi « après l’é­té, c’est avant l’é­té », quel meilleur moment choi­sir pour vous emme­ner vers le soleil res­plen­dis­sant du Midi que le noir de l’hi­ver ? Et comme le hasard fait par­fois bien les choses, ce n’est pas plus tard qu’­hier que, pro­fi­tant de mes congés, je suis tom­bé sur un petit texte à l’in­ti­tu­lé pro­met­teur : Les vacances de Lili. Bon, j’a­voue que c’est sur­tout la 4e de cou­ver­ture qui m’a séduit, et com­ment seule­ment ima­gi­ner de résis­ter à une affir­ma­tion comme celle-ci à pro­pos du conte­nu du volume en ques­tion : « Du sexe intense, sans détours. » ? Une affir­ma­tion, je tiens à vous le pré­ci­ser d’emblée, qui n’a rien d’exagéré.

L’au­teur, évi­dem­ment un adepte du vieux pré­cepte d’Ho­race, pro­pulse le lec­teur dans un face-à-face avec sa pro­ta­go­niste, sans autre préliminaires :

Tout près des 1.70 m, un « beau petit cul » […], des che­veux châ­tain mi-longs, des yeux noi­sette et un visage en forme d’a­mande. Et puis des seins, des 90D main­te­nant, qui ont ryth­mé son ado­les­cence entre fier­té et honte.[1]Alex Bleuet, Les Vacances de Lili, 2018, p. 1

Cette pro­ta­go­niste, pré­sen­tée comme ça, n’a rien de très spé­cial (abs­trac­tion faite de sa géné­reuse poi­trine, of course !), une jeune femme comme tant d’autres. Mais si j’ai tenu à vous citer le pas­sage en ques­tion, c’est à cause de cette paire de seins bien lourds ayant « ryth­mé l’a­do­les­cence » de la jeune Lili. Et c’est vrai qu’on les voit bon­dir, ces seins, pen­dant que sa pro­prié­taire par­ti­cipe à l’é­du­ca­tion phy­sique – une belle course par exemple – ou pen­dant qu’elle se pro­mène en ville, ses atouts pro­émi­nents lui atti­rant non seule­ment les regards de la popu­la­tion mâle, mais ceux aus­si d’une bonne par­tie de ses congé­nères par­ta­gées entre jalou­sie et désir. C’est grâce à de telles trou­vailles que l’au­teur a réus­si à me mettre sous le charme, le seuil du texte à peine fran­chi. Mais je pré­fère vous mettre en garde : La suite n’est pas tou­jours à la hau­teur de cette ouver­ture – sty­lis­ti­que­ment par­lant sur­tout. Pour ce qui est des aven­tures que Lili s’ap­prête à vivre, c’est autre chose.

Le début de son aven­ture trouve la jeune Lili, le bac en poche et la majo­ri­té atteinte depuis à peine quelques jours, dans la voi­ture de son amie Chris­telle, en route pour le Sud, plus exac­te­ment « un cam­ping des Landes » où elle s’ap­prête, au seuil d’une nou­velle étape de sa vie, à fêter le bac et la nou­velle liber­té avec un groupe de copines et de copains. Mais avant d’ar­ri­ver à des­ti­na­tion, Lili devra vivre un épi­sode aus­si invrai­sem­blable que rocam­bo­lesque, un ren­dez-vous avec la honte qui pla­ce­ra ses vacances – de façon presque évi­dente – sous le signe de l’ex­hi­bi­tion. Ce qui, compte tenu de son phy­sique avan­ta­geux de jeune fille en fleur – et de la taille de ses obus – ne lais­se­ra per­sonne indif­fé­rent. J’hé­site entre la ten­ta­tion de vous dévoi­ler (et c’est bien le mot) ce qui se passe dans la sta­tion ser­vice où les deux amies s’ar­rêtent pour une petite pause fraî­cheur et le désir de lais­ser le plai­sir des futurs lec­teurs intact… Qu’il suf­fise de vous dire que l’é­pi­sode implique un sou­tien-gorge enle­vé pour plus de confort, un débar­deur mouillé et un départ pré­ci­pi­té. Mais, mal­gré la honte de se trou­ver la cible de tous les regards et de tous les fan­tasmes – et inci­dem­ment aus­si des smart­phones d’une bande d’a­dos en route pour leur colo – cet épi­sode a l’a­van­tage de pré­pa­rer la pro­ta­go­niste à ce qui va suivre, à savoir la vie sous le soleil au milieu d’une bande d’a­mis pous­sés à tous les excès par les tem­pêtes hor­mo­nales empor­tant jus­qu’aux der­nières inhibitions.

À lire :
Collectif, Sea, sex and sun

La suite du texte est à l’i­mage de ce pre­mier épi­sode, et Lili cède avec de plus en plus de faci­li­té au désir de mon­trer son corps plei­ne­ment épa­noui et de pro­fi­ter des atouts mis à sa dis­po­si­tion par une dame Nature vrai­ment très géné­reuse. Et comme elle est jeune et vigou­reuse et pous­sée par le désir des décou­vertes, elle ne se conten­te­ra pas long­temps d’un rôle pas­sif. Débar­ras­sée de ses vête­ments, les inhi­bi­tions et la morale incul­quée ne feront pas long feu sous la pres­sion de la cha­leur et du désir qui, une fois né, monte et remonte jus­qu’à la pous­ser à des excès dignes des plus invé­té­rées des liber­tines. Et le tout sous le soleil du sud, à deux pas des vagues de l’o­céan et de ses plages. Je ne sais pas vous, mais moi, cela me trans­porte au sep­tième ciel rien qu’à y penser.

Les épi­sodes qui s’en­chaînent, des pre­miers pas timides sous le patro­nage de Sap­pho au gang-bang final, en pas­sant par les chattes des copines bouf­fées et les queues des copains sucées et accueillies dans la cha­leur d’une vulve bien res­ser­rée, n’ont rien de bien extra­or­di­naire consi­dé­rés sépa­ré­ment, c’est jus­te­ment leur enchaî­ne­ment presque inin­ter­rom­pu qui en fait quelque chose de par­ti­cu­lier, confé­rant au récit une rare inten­si­té, et l’au­teur réus­sit à créer une ambiance où, l’es­pace de quelques jours d’une liber­té aus­si incon­di­tion­nelle que totale, le désir règne en maître incon­tes­té sur un espace comme pro­je­té hors du temps et des contraintes.

Si on trouve donc dans Les vacances de Lili un très grand nombre de scènes de séduc­tion et de jambes en l’air (et aus­si dans une grande varié­té de posi­tions pour­vu que celles-ci rendent l’a­na­to­mie acces­sible aux doigts, aux langues et aux queues), il y a aus­si quelques fai­blesses par­mi les­quelles il faut mal­heu­reu­se­ment comp­ter le fléau des auto-édi­tés, à savoir la pré­sence de nom­breuses coquilles et même quelques pro­blèmes de construc­tion comme dans cette scène de séduc­tion les­bienne entre Léa et Lili – à par­tir de la page 38 – où l’au­teur s’embrouille les pattes entre toutes ces spi­rantes alvéo­laires pré­sentes dans les pré­noms de nos jeunes appren­ties saphiques, ce qui rend la mise en place quelque peu mal­adroite. Ce qui n’en­lève pour­tant rien à la puis­sance du pas­sage à l’acte qui suit quelques lignes plus loin qui ne laisse rien à dési­rer aux lec­teurs les plus enhar­dis. Mais de telles fai­blesses sont rache­tées par le charme qui plane au-des­sus de ces jeunes qui se laissent aller aux décou­vertes sans se lais­ser embar­ras­ser par des consi­dé­ra­tions d’une morale à la noix comme par exemple dans cette scène de ten­ta­tion les­bienne à la plage où l’ap­pli­ca­tion de crème solaire dérape en par­tie de pelo­tage. Et com­ment ne pas admi­rer une pro­ta­go­niste qui court d’ex­cès en excès en embras­sant une sen­sua­li­té à peine décou­verte avec un voca­bu­laire qui la met hors d’at­teinte des qu’en dira-t-on :

Il y a deux semaines j’é­tais vierge, aujourd’­hui je fais des gang-bangs, je suce au bord de la pis­cine, je couche avec des filles […] Je dois être une salope… Mais je m’en fous j’aime ça ![2]Les vacances de Lili, p. 97

Avant de ter­mi­ner de vous décor­ti­quer cette « genèse d’une salope », une der­nière remarque à pro­pos d’une sorte de tic de l’au­teur. Celui-ci a une drôle de ten­dance à mettre des nombres un peu par­tout, comme par exemple quand il parle de la taille des tétons :

Et au milieu, les tétons pointent, sans doute à cause de l’eau froide et de la clim. Ils tirent d’au moins 1.5 cm le tis­su détrempé…

Drôle d’ob­ser­va­tion, me suis-je dit, sans tou­te­fois m’y attar­der, même si, en cours de lec­ture, j’ai pu ren­con­trer quelques pas­sages simi­laires. Mais j’ai fini par com­prendre tout l’in­té­rêt d’une telle manie – bien inno­cente – peu avant la fin, jus­te­ment pen­dant l’é­pi­sode du gang-bang où l’au­teur a trou­vé le moyen de don­ner un rôle de pre­mière impor­tance à – une règle et un car­net de notes. À vous de décou­vrir l’u­sage qu’on peut en tirer.

À lire :
Ero Tismo, Quatre paires de seins sur la plage

Les Vacances de Lili se sont révé­lé une belle ouver­ture de l’é­di­tion 2020 des Lec­tures esti­vales, et je vous invite à décou­vrir au plus vite les aven­tures de cette ado­les­cente et de ses copains pro­pul­sés dans un entre-deux pro­pice aux décou­vertes, dans un éphé­mère espace de liber­té aus­si rare que pré­cieux dont il faut pro­fi­ter à fond. Ce que la pro­ta­go­niste a bien compris.

Alex Bleuet
Les Vacances de Lili
Auto-publi­ca­tion
ISBN : 9781720026709

Réfé­rences

Réfé­rences
1 Alex Bleuet, Les Vacances de Lili, 2018, p. 1
2 Les vacances de Lili, p. 97
Dessin d'une femme nue debout, vue de profil. Elle tient un gode dans la main droite qu'elle est en train de s'introduire dans le vagin.
Dessin réalisé par Sammk95