Rogé­rio Sil­va, Ser­ving Model nue de profil

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Rogério Silva, Nu
Rogé­rio Sil­va, « Ser­ving model » nue de pro­fil. Un des­sin ins­pi­ré par une « ména­gère bri­tan­nique qui s’en­nuie » (J Bulg).

Rogé­rio Sil­va est un artiste por­tu­gais que j’ai croi­sé, comme dans bon nombre de cas, sur Devian­tArt où il entre­tient une pré­sence vir­tuelle bien gar­nie en Nus artis­tiques. Et comme j’ai aus­si­tôt sen­ti dans ses des­sins un cer­tain vérisme, la pré­sence de détails qui ne s’in­ventent pas, d’un vécu qui dépasse les abs­trac­tions, je l’ai contac­té pour savoir si ses des­sins étaient dis­po­nibles à la vente. Vous vous dou­tez de sa réponse – qui, comme j’ai dû l’ap­prendre dans de trop nom­breux cas, est loin d’être évi­dente – et j’ai pu accueillir chez moi la belle que vous pou­vez admi­rer ci-contre quelques semaines seule­ment après avoir conclu cet échange initial.

Il serait faux de réduire Rogé­rio Sil­va au seul domaine du des­sin éro­tique, il suf­fit de par­cou­rir ceux qu’il a ras­sem­blés sur ses nom­breux pro­fils sur des sites consa­crés aux arts visuels – Fli­ckr, Devian­tArt, Art­ma­jeur entre autres – où l’on trouve une mul­ti­tude de sujets : des sites de sa ville natale, des pay­sages, des ani­maux et même quelques icônes, spé­ci­mens d’une pein­ture reli­gieuse qui ne fait pas car­ré­ment par­tie de la tra­di­tion occi­den­tale. Inutile pour­tant de vous pré­ci­ser que si je l’ai remar­qué et si je vous en parle aujourd’­hui, c’est qu’une très grande par­tie de son tra­vail est ins­pi­rée par le corps fémi­nin dans son plus simple appa­reil. Cela ne va évi­dem­ment pas sur­prendre les habi­tués de la Bauge lit­té­raire, ceux-ci se deman­de­ront tout au plus quel est le détail qui l’a fait sor­tir de la foule, parce qu’une chose est cer­taine : il n’y a pas, dans le monde artis­tique, pénu­rie de nus.

Rogério Silva, La pose sexy de Marie
Rogé­rio Sil­va, La pose sexy de Marie (Détail. Cli­quer pour voir l’ori­gi­nal)

Ce qui m’a frap­pé dans les des­sins de Rogé­rio, c’est d’a­bord une cer­taine sobrié­té, une éco­no­mie des moyens, une rete­nue de la part d’un artiste qui, s’il affec­tionne des corps géné­reux à la chair pul­peuse, une chair qu’on aime­rait sai­sir à pleines mains afin de se lais­ser enva­hir par la cha­leur qu’elle dégage, reste avant tout obser­va­teur, lais­sant à d’autres la part du voyeur ivre des opu­lences qui s’é­talent sous ses yeux dans toute leur sen­suelle richesse. De ce côté-là, ses des­sins res­semblent drô­le­ment à des pièges où se prennent les regards et celui qui est venu pour voir se retrouve aspi­ré par l’œuvre, réduit à fan­tas­mer devant toutes ces femmes dont la chair est juste là, si près des yeux et si loin des mains – et de tous les autres appen­dices qu’on pour­rait imaginer.

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Pour une grande par­tie de ses Nus, Rogé­rio s’est ser­vi d’un pro­cé­dé deve­nu très cou­rant sur les sites de pho­to­gra­phie et de pein­ture, à savoir peindre ou des­si­ner d’a­près des pho­tos de modèles ama­teurs. Ce qui pré­sente l’a­van­tage d’être acces­sible à tout le monde, les modèles ne deman­dant pas – en géné­ral – des hono­raires, et le désa­van­tage de devoir se conten­ter d’un ins­tan­ta­né en deux dimen­sions, ce qui réduit quand même furieu­se­ment la com­plexi­té d’un être en chair qui occupe les trois dimen­sions de l’es­pace, et enlève en même temps au tableau le jeu des muscles et des ten­dons en mou­ve­ment. Aux spec­ta­teurs ensuite la tâche de déter­mi­ner dans quelle mesure les artistes ont réus­si à maî­tri­ser les défis ain­si posés. Un autre incon­vé­nient de ce pro­cé­dé – encore que cela est peut-être plu­tôt une ques­tion de curio­si­té de ma part – réside dans le carac­tère par­fois assez éphé­mère des pro­files de ces femmes qui oscil­lent entre modèle et objet de dési­rs moins avouables. Rogé­rio a eu l’o­bli­ga­tion, dans un grand nombre de cas, de nom­mer les modèles et de four­nir en même temps des liens vers leurs pro­fils. Mal­heu­reu­se­ment, dans la plu­part des cas, le visi­teur curieux se heurte contre un mes­sage laco­nique comme quoi le site ou la page en ques­tion n’existe plus. Quant à moi, j’ai eu la chance de pou­voir retrou­ver – grâce à quelques recherches – le site du modèle ayant ins­pi­ré Rogério.

Comme je l’ai indi­qué, Rogé­rio a l’ha­bi­tude d’i­den­ti­fier ses modèles – ce qui per­met à ceux-ci de se faire connaître, dans quelque but que ce soit – et de don­ner des liens vers les pro­files. Pour le des­sin que j’ai acquis, il a indi­qué un cer­tain Ser­ving model, mais le lien accom­pa­gnant cette attri­bu­tion ne menait nulle part, ce qui est loin d’ailleurs d’être un cas iso­lé. Mais ensuite, coup de bol, à force de par­cou­rir sa vaste gale­rie, je suis tom­bé sur des des­sins men­tion­nant un autre modèle, J Bulg, une dame qui res­sem­blait tel­le­ment à ce fameux Ser­ving model qu’il a fal­lu regar­der ça de plus près. Et j’ai effec­ti­ve­ment retrou­vé sur le compte Fli­ckr du modèle en ques­tion un des­sin éga­le­ment pré­sent chez Rogé­rio, le modèle étant iden­ti­fié comme « J Bulg » dans la gale­rie de Rogé­rio et comme « Ser­ving model » dans celle de la belle en question.

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Gerald Baes, Trois dessins pornographiques
Rogerio Silva, J Bulg nude on bed
Rogé­rio Sil­va, J Bulg nude on bed – le des­sin qui a per­mis d’é­ta­blir l’i­den­ti­té de J Bulg et de Ser­ving model – une ména­gère bri­tan­nique qui s’en­nuie (« Bri­tish bored housewife »)
Le modèle J Bulg vue de pro­fil par deux artistes dif­fé­rents. Sur la base d’une même photo ?

Cela ne me sert à pas grand chose de connaître l’i­den­ti­té vir­tuelle de celle qui a ins­pi­ré un des­sin à Rogé­rio Sil­va, si ce n’est qu’à satis­faire une cer­taine curio­si­té – en même temps que l’en­vie de décou­vrir ce corps sous d’autres angles, de la voir dévoi­ler des détails sup­plé­men­taires, ce qui peut finir par don­ner une idée plus com­plète de la femme réelle à la base d’une œuvre d’art. Et si on peut se poser des ques­tions à pro­pos de l’in­té­rêt d’une telle démarche, je vous rap­pelle que la ques­tion de l’i­den­ti­té de celle qui a posé pour l’Ori­gine du Monde a été chau­de­ment dis­cu­tée pen­dant des années – avant de trou­ver une réponse il y a à peine quelques mois.

Si je n’ai pas pu retrou­ver la pho­to qui a ser­vi de modèle à Rogé­rio pour Ser­ving model nue de pro­fil, je suis tom­bé, tou­jours dans la gale­rie de J Bulg, sur un autre des­sin – que je repro­duis ici dans un mon­tage avec celui en ma pos­ses­sion pour per­mettre une com­pa­rai­son plus facile – dont on peut se deman­der s’il n’a pas été exé­cu­té d’a­près la même source. Mal­heu­reu­se­ment, je n’ai pas pu retrou­ver l’ar­tiste pour lui poser la question.

Et voi­ci com­ment une ména­gère bri­tan­nique qui se met à poil pour com­battre l’en­nui (eh oui, pour­quoi détruire un si beau cli­ché ?) est venue orner les murs de ma Bauge…

Dessin d'une femme nue debout, vue de profil. Elle tient un gode dans la main droite qu'elle est en train de s'introduire dans le vagin.
Dessin réalisé par Sammk95