La beau­té (presque) binaire du « Pale Elk »

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Et voi­ci que je vous pré­sente un autre artiste croi­sé sur un de mes sites pré­fé­rés, site que je hante avec une cer­taine obses­sion du beau et où je tombe, à pra­ti­que­ment chaque visite, sur des images qui me fas­cinent et me pas­sionnent. Cette fois-ci, il s’a­git d’un artiste dont je ne sais abso­lu­ment rien, sauf qu’il serait polo­nais. Ou tout du moins ins­tal­lé en Pologne. Le tout d’a­près une des très rares infor­ma­tions qu’il consent à dévoi­ler sur sa page. Le site en ques­tion, vous l’au­rez devi­né, est évi­dem­ment ce repaire légen­daire d’ar­tistes, Devian­tArt, et le nom – ou plu­tôt le pseu­do – de l’ar­tiste est PaleElk. L’é­lan pâle.

Pale Elk, Aperçu de sa galerie sur DeviantArt
Pale Elk, Aper­çu par­tiel de sa gale­rie sur Devian­tArt (cap­ture d’é­cran réa­li­sée le 19/11/2023)

Comme vous pou­vez faci­le­ment le consta­ter rien que dans cet échan­tillon, l’u­sage du noir et du blanc est le mode d’ex­pres­sion favo­ri de Pale Elk, une seule image – deuxième en par­tant de la gauche dans la bande supé­rieure – sort des rangs étant visi­ble­ment com­po­sée de niveaux de gris, tan­dis que les autres semblent com­po­sées à par­tir d’une échelle binaire.

À lire :
L’i­ma­gi­naire dépra­vé de Boo Rudetoon

Atten­tion pour­tant, chers lec­teurs, chères lec­trices, quand je parle ici de « binaire », je ne parle pas du concept post-moderne remet­tant en cause la bina­ri­té du fémi­nin et du mas­cu­lin. La bina­ri­té, ici, dans le contexte de l’ar­tiste dont je suis en train de vous par­ler, désigne celle du noir et du blanc, qui, trans­po­sée dans un contexte numé­rique, se résume à l’op­po­si­tion entre « 0 » (noir) et « 1 » (blanc). Du binaire à l’é­tat pur, plon­gée vers les sources du numé­rique, donc. Mais quand je mets une petite paren­thèse devant ce mot, cela veut dire que la trame numé­rique des images – telles que je peux les télé­char­ger depuis le site de l’ar­tiste sur Devian­tArt pour les ana­ly­ser avec le GIMP1 – ne se résume pas à ces deux états sus-men­tion­nés, mais est com­po­sée d’un assez grand nombre de nuances en gri­saille. Mais si, au lieu de bla­bla­ter, je vous fai­sais une démons­tra­tion ? Voi­ci avec Sapio­man­cy un exemple – d’ailleurs une des rares images à por­ter un titre – en ver­sion ori­gi­nale (à gauche) et trans­for­mé en noir et blanc (à droite) :

Pale Elk, Sapiomancy
Pale Elk, Sapiomancy

La dif­fé­rence entre les deux modes saute aux yeux, pas besoin d’a­na­lyses sup­plé­men­taires pour s’en rendre compte. Dans un sou­ci d’exac­ti­tude, voi­ci pour­tant le résul­tat de l’a­na­lyse colo­ri­mé­trique de l’original :

Vous consta­te­rez que l’i­mage compte 256 « cou­leurs » dis­tinctes, et vous note­rez aus­si les deux « cornes » indi­quant, à tra­vers le compte des cou­leurs domi­nantes, une sorte de bina­ri­té indi­ca­trice de ce que vous per­ce­vez comme du « noir » et du « blanc ».

À lire :
Shout-out : quelques artistes croi­sés sur Deviant Art
PaleElk, Quickie.
PaleElk, Qui­ckie. Puk­lié le 2 juin 2023 sur Devian­tArt. Taille légè­re­ment réduite par votre serviteur.

Au jour où je rédige cet article, PaleElk a publié 78 images dans sa gale­rie, la plus grande par­tie de celles-ci (52) ayant pour sujet des femmes plus ou moins dénu­dées. Par­mi ces 52 images de femmes, il y en a moins de dix où elles figurent com­plè­te­ment vêtues, dans la mesure où le for­mat per­met d’en juger avec cer­ti­tude. Comme il y a aus­si des por­traits ou des mi-corps, il est par­fois tout sim­ple­ment impos­sible d’af­fir­mer si le modèle est nu ou au moins en par­tie vêtu. Et puis il y a un petit nombre d’i­mages qui laissent sub­sis­ter un cer­tain flou, et on est dans l’im­pos­si­bi­li­té d’af­fir­mer avec cer­ti­tude si ce que l’on voit est bien de la peau nue ou un léger tis­su. L’ar­tiste est d’ailleurs assez avare en mots quand il s’a­git de don­ner un titre à ses pro­duc­tions, le visi­teur en étant réduit, dans la majo­ri­té des cas, à se faire une idée basée sur rien que ses propres moyens pour cer­ner de plus près l’œuvre qu’il est en train de contem­pler. Des 78 images, 47 portent comme seul titre un point d’in­ter­ro­ga­tion (« ? »), et 17 des 31 images res­tantes sont ras­sem­blées sous le titre assez peu flat­teur de Qui­ckie. Si ce terme-là a évi­dem­ment la conno­ta­tion éro­tique de coup « rapide »2, je doute de ce que l’au­teur ait vou­lu orien­ter les visi­teurs dans ce sens-là. Je vous affiche un exemple ci-contre, à vous de juger. Pour voir l’in­té­gra­li­té des Qui­ckies, sui­vez le lien ci-dessus.

À côté des femmes – effec­ti­ve­ment très belles dans la sobrié­té des nuances de gris et par­fois même un brin pro­vo­ca­trices3 – on trouve des images qui relè­ve­raient plu­tôt de l’hor­reur. Si cer­taines de celles-ci expriment des idées assez géné­rales comme celle du Para­site ou de l’Enfer, d’autres, comme Qui­ckie – The Rag­man, semblent basées sur des bandes des­si­nées de l’u­ni­vers Marvel.

Si l’au­teur semble donc avoir un cer­tain pen­chant pour les sujets fémi­nins – même les repré­sen­ta­tions de l’hor­reur arborent sou­vent des traits fémi­nins – la diver­si­té est loin d’être absente de sa gale­rie. Mais mes lec­trices et mes lec­teurs ne seront pas sur­pris d’ap­prendre que l’au­teur de ces lignes a pui­sé dans le domaine éro­tique quand il s’est agi de choi­sir un sujet pour une nou­velle illus­tra­tion pour la Bauge lit­té­raire. Et c’est ain­si que celle-ci s’est enri­chie d’un nou­vel en-tête bap­ti­sé « Rea­ding Chloé » par votre serviteur :

Pale Elk, Reading Chloé
Pale Elk, Rea­ding Chloé. En-tête pour la Bauge lit­té­raire réa­li­sé en novembre 2023.

Le titre s’ex­plique d’ailleurs très faci­le­ment par le fait que la beau­té allon­gée sur le ventre est en train de lire un texte signé par le San­glier, à savoir La Fian­cée de la Dou­leur, dont la pro­ta­go­niste s’ap­pelle – Chloé. J’es­père que l’une ou l’autre par­mi vous l’au­ra reconnu…

Avant de ter­mi­ner, une der­nière remarque à pro­pos des femmes de PaleElk. À contem­pler la gale­rie, on se rend compte que les courbes jouent un rôle impor­tant dans la repré­sen­ta­tion des corps dont cer­tains semblent vou­loir ondu­ler comme ceux des corps sous-marins. Un pro­cé­dé qui s’ins­pire d’une façon très heu­reuse des courbes fémi­nines, faites pour faire tour­ner les têtes de celles et de ceux qui les contemplent avec convoi­tise. Et je suis très content de pou­voir comp­ter une de ces œuvres dans la gale­rie de mes en-têtes. La Bauge en sort plus riche !

Les quatre images ras­sem­blées dans cette gale­rie portent comme titre (de gauche à droite)

  • Sapio­man­cy
  • ?
  • In praise of Bacchus
  • ?

Il ne me reste plus qu’à tendre la main à cet artiste incon­nu tout en lui sou­hai­tant pleine de visi­bi­li­té. Dans l’es­poir d’y avoir peut-être un tant soit peu contribué.

  1. GNU Image Mani­pu­la­tion Pro­gram – logi­ciel de mani­pu­la­tion d’i­mages très pri­sé dans le monde des logi­ciels libres ↩︎
  2. Chaque fois que je tombe sur ce terme de « qui­ckie », je dois pen­ser à la série Les p’tites vites de Bri­gitte, sor­tie chez BD-Adultes. Et cela ne manque jamais de me faire rire ;-) ↩︎
  3. Par­mi les femmes de PaleElk, cer­taines portent d’ailleurs la plume au bec. Ce qui leur confère sans doute une forte dose d’é­ro­tisme à laquelle votre ser­vi­teur est très sen­sible … ↩︎
La Sirène de Montpeller