Ste­fa­no Maz­zot­ti, Trois copines à Milan

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Bon, on dit que la lit­té­ra­ture peut t’ap­prendre des choses. Et ben, pour la BD dont je m’ap­prête à vous par­ler, on peut dire que c’est le cas. Parce que, pour ma part, je ne savais pas que Milan la bour­geoise, capi­tale des finances de la pénin­sule, était aus­si celle de la débauche et que les clubs y abri­taient de véri­tables orgies. Mais c’est jus­te­ment pour cela que j’a­dore la lec­ture – on en sort gran­di. Au moins pour ce qui est de cer­taines par­ties de l’a­na­to­mie mas­cu­line. Ce qui, il faut le sou­li­gner, est la faute aux trois héroïnes que Ste­fa­no Maz­zot­ti lance à la conquête de la capi­tale lom­barde : Anna, Lulù et Ily. Non seule­ment que les trois dénom­mées sont ter­ri­ble­ment exci­tantes – ce dont le lec­teur pour­ra faci­le­ment se rendre compte en regar­dant la cou­ver­ture des Trois copines à Milan – , mais celles-ci ne reculent devant aucune exhi­bi­tion dans la mesure où leurs charmes sont capables de leur atti­rer des bites. Ce qui ne man­que­ra de se pro­duire comme vous pour­rez le consta­ter au bout de quelques pages.

Ily, Lulù et Anna - les trois grâces en train de se préparer pour la nuit.
Ily, Lulù et Anna – les trois grâces en train de se pré­pa­rer pour une nuit de débauche. (p. 21)

L’in­trigue n’est pas des plus recher­chées et se raconte en quelques mots : trois filles ont envie de s’é­cla­ter et décident de pas­ser un week-end à Milan. Sous le coup d’un « élixir d’a­mour » rap­por­té par l’une d’elles du Maroc, elles perdent toutes les inhi­bi­tions avant de som­brer dans la cha­leur sen­suelle d’une nuit mila­naise. Une nuit qu’elles ter­minent (Anna et Ily, au moins) dans une chambre incon­nue en com­pa­gnie d’une faune locale des plus par­ti­cu­lières où un trans se mêle à un nain pro­duc­teur de por­no, un strip­per et un bar­man. Une joyeuse bande réunie le temps d’une nuit mémo­rable par le désir et l’en­vie de se faire écla­ter les chattes et explo­ser les bites. Et puis­qu’on parle de trans­gres­sion, même la plus timide de la bande, Anna, se lais­se­ra convaincre par les charmes des chattes qui s’a­gitent sous son nez et ne demandent qu’à être léchées.

Si l’in­trigue n’a rien de raf­fi­né, Maz­zot­ti sait convaincre par un des­sin aux traits plu­tôt sobres et l’u­sage de cou­leurs exu­bé­rantes bien adap­té à cette nuit pas­sée sous l’emprise de la drogue dont un des effets est de chan­ger la per­cep­tion des couleurs :

La per­cep­tion des cou­leurs chan­ge­ra éga­le­ment, elles vous sem­ble­ront plus vives, les rouges plus rouges, les jaunes plus jaunes, les verts seront écla­tants.1

Ce qui n’est pas faux :

À lire :
Barbara Katts, Je vous aime
Stefano Mazzotti, Trois copines à Milan, Traitement des couleurs (p. 34)
Si la drogue change la per­cep­tion des cou­leurs, elle laisse intacte la rai­son, fait démon­tré ici par Anna qui ne manque pas de recon­naître une orgie quand elle se trouve au bon milieu d’un tel évé­ne­ment. (p. 34)

Avec tout ça, on ne peut pas dire que les damoi­selles s’en­nuient. Ou se refu­se­raient quoi que ce soit. De bites à foi­son en chattes dégou­li­nantes en pas­sant par les plai­sirs hybrides offerts par Car­men, une trans dotée de belles paires de seins et de couilles, tout y passe au point de chauf­fer à blanc les chairs d’An­na qui, timide d’a­bord, est deve­nue le centre des atten­tions, inca­pable d’of­frir le moindre répit à ses orifices :

Quand il faut se refroi­dir la chatte, on sait que la nuit a été – agi­tée (Trois copines à Milan, p. 60)

Je l’ai déjà dit au début et je le répète, l’in­trigue de cette BD n’a rien de bien pas­sion­nant. Tout est dans le des­sin, dans les cou­leurs et sur­tout dans l’in­dé­cence de cette bande de copines. Qui n’hé­sitent pas à repous­ser les limites au-delà de toute décence et qui n’ont pas le moindre scru­pule quand il s’a­git d’a­voir recours – pour mieux s’é­cla­ter – à une drogue aux ingré­dients incon­nus. Et qui se quittent, en fin de volume, en se pro­met­tant de remettre ça quelques semaines plus tard. Une atti­tude qui ne peux que plaire aux habitué(e)s de la Bauge.

Gai­jin­joe, dans l’article consa­cré à Maz­zot­ti, le rap­proche de deux incon­tour­nables du des­sin éro­ti­co-por­no­gra­phique ita­lien, à savoir Gio­van­na Casot­to et Luca Tar­laz­zi, deux des­si­na­teurs qu’il a pu croi­ser à l’é­poque de leur com­mune col­la­bo­ra­tion à la revue Selen. Il va même jus­qu’à dire que la qua­li­té du des­sin de Maz­zot­ti n’a rien à envier à ses deux com­pères de chez Selen :

Maz­zot­tis Cha­rak­tere – beson­ders die männ­li­chen Pro­ta­go­nis­ten – erin­nern an die Arbei­ten von Gio­van­na Casot­to und Luca Tar­laz­zi. Qua­li­ta­tiv ist Maz­zot­ti abso­lut ebenbür­tig zu den genann­ten Künst­lern.2

Je ne peux pas vrai­ment juger du bien-fon­dé de cette affir­ma­tion, n’ayant sous les yeux qu’un échan­tillon de son art pro­duit vingt ans plus tard que les contri­bu­tions de Maz­zot­ti à la célèbre revue. Per­son­nel­le­ment, je pré­fère le des­sin assez épu­ré de Tar­laz­zi et l’art pho­to-réa­liste de Casot­to aux traits par­fois bizar­re­ment flous des per­son­nages de Maz­zet­ti dans les Trois copines. Je dirais même que le des­sin n’ar­rive pas à bien cer­ner les carac­tères et que ceux-ci man­que­raient ensuite de net­te­té. Est-ce pour cela que Maz­zot­ti fait preuve ici d’une cer­taine ten­dance à l’exa­gé­ra­tion, en don­nant à ses pro­ta­go­nistes des expres­sions assez bizarres, à la limite des grimaces ?

À lire :
Évohé, la turista !
Les trois copines arborent assez sou­vent des expres­sions assez exa­gé­rées, à la limite des gri­maces. Obser­va­tion illus­trée ici par Anna et Ily (p. 61).

Mais le fait de man­quer de net­te­té, c’est une remarque qui pour­rait s’a­dres­ser aux pro­ta­go­nistes des Trois copines à Milan – tom­bées sous l’emprise de la drogue, les sens en ébul­li­tion, les chairs liqué­fiées – et les moyens artis­tiques déployés par Maz­zot­ti ne seraient plus que l’ex­pres­sion adé­quate de l’é­tat d’âme de celles-ci pen­dant leur inter­mi­nable nuit de débauche.

Quoi qu’il en soit – et je suis conscient du fait que mes remarques relèvent en grande par­tie d’une ques­tion de goût – j’ap­pré­cie le côté indé­cent de cette aven­ture mila­naise, une indé­cence qui n’a rien d’ar­ti­fi­ciel, mais qu’on dirait enra­ci­née au plus pro­fond des trois copines, n’ayant atten­du que l’oc­ca­sion pro­pice pour éclore, telle une pétale intime gavée de sang, éclose sous les coups de langue d’une amante ou les assauts d’une bonne bite bien longue et épaisse. Et, contrai­re­ment à un grand nombre de ses confrères, Maz­zot­ti n’a pas recours aux pra­tiques les plus exo­tiques ou aux ténèbres d’un don­jon déchi­rées par les cris des sou­mises en sang pour séduire ses lec­trices et ses lec­teurs. Un détail que j’ap­pré­cie énor­mé­ment. Une BD que je ne peux donc que recom­man­der. Peut-être pour pas­ser une petite heure sous le soleil afin de se mettre dans l’am­biance des nuits chaudes du lit­to­ral méditerranéen.

Ste­fa­no Maz­zot­ti
Trois copines à Milan
Dyna­mite
ISBN : 9782382095447

  1. Ste­fa­no Maz­zot­ti, Trois copines à Milan, p. 31 ↩︎
  2. « Les per­son­nages de Maz­zot­ti – et sur­tout ses pro­ta­go­nistes mas­cu­lins – rap­pellent les tra­vaux de Gio­van­na Casot­to et Luca Tar­laz­zi. Niveau qua­li­té, il se trouve au même niveau que les artistes sus-men­tion­nés. » (Gai­jin­joe à pro­pos de Ste­fa­no Maz­zot­ti sur eroticcomic.info.) ↩︎
Dessin d'une femme nue debout, vue de profil. Elle tient un gode dans la main droite qu'elle est en train de s'introduire dans le vagin.
Dessin réalisé par Sammk95