
Depuis les plus belles années d’une adolescence à fond vécue (arf !), je traîne sur moi deux vers. Deux vers qui résument un échange entre deux poètes allemands dont les voix comptent parmi ce que la langue allemande a de mieux à offrir : Elle, Else Lasker Schüler, Lui, Gottfried Benn. Au bout d’une histoire d’amour Elle Lui adresse la phrase suivante :
- Je suis le bord de ton chemin.
et lui de répondre :
- Personne ne sera le bord de mon chemin.
En allemand, ça donne :
- Ich bin dein Wegrand.
- Keiner wird mein Wegrand sein.
Comme mes jours et mes nuits sont remplis d’idées qui divaguent, ces vers sont revenus me hanter de leur sonorité, trottant sans cesse au bon milieu de mes rêvasseries et me faisant répéter comme un insensé : « Keiner wird mein Wegrand sein ».
Ce matin, obsédé par le travail de sape des décennies, je me suis amusé à chercher les poèmes en question sur la toile pour les traduire. Je ne prétends aucunement à donner un quelconque caractère littéraire à cette traduction, l’important étant d’évoquer des images, de faire résonner des ambiances…
Écoute La nuit je vole les roses de ta bouche afin que nulle femelle n'y trouve à boire. Celle qui m'embrasse me vole de mes averses que je traçais autour de tes membres. Je suis le bord de ton chemin. Celle qui te touche s'écrase. Sens-tu ma vivance partout comme une frange lointaine ?
Aucune consolation Personne ne sera le bord de mon chemin. Laisse donc faner tes fleurs. Mon chemin déborde et se poursuit tout seul. Deux mains forment une coupe trop petite. Un cœur est une colline trop peu élevée pour s'y reposer. Toi, je vis toujours à la plage et au-dessous de la chute de fleurs de la mer. L'Égypte se trouve devant mon cœur, L'Asie se lève. L'un de mes bras se trouve toujours au feu. Mon sang est de la cendre. Je me dirige en sanglotant toujours passant à côté de seins et d'ossements vers les îles Tyrrhéniennes : Une vallée de peupliers blancs se dessine dans la pénombre Ilyssos aux rivages couverts de prés Eden et Adam et une terre faite de nihilisme et de musique.
Pour consulter les poèmes dans la langue d’origine, rendez-vous sur expydoc.com.
Commentaires
Une réponse à “Le bord de mon chemin – Gottfried Benn à Else Lasker-Schüler”
eh bien cher Tom… C’est toi qui te laisse aller à présent dans l’écriture. J’en suis ravie pourvu qu’elle t’aide à traverser tes épreuves. Bisous et courage.