
Certains sauront sans doute que l’usage du mot « auteur » pour désigner une femme qui écrit m’a toujours dérangé. Tout comme professeur, Mme le ministre et autres catastrophes linguistiques, pourtant consacré par cette prestigieuse institution qui règne depuis l’âge de Louis XIII sur l’usage du Français.
Étant de culture allemande, où la différence est très nette entre le masculin et le féminin pour désigner le sexe de la personne qui exerce la profession en question (souvent indiqué par la terminaison ‑in comme dans Lehrerin ou Studentin), j’ai très tôt opté pour le mot auteure, terme qu’on retrouve assez systématiquement dans mes articles (bon, ce n’est pas une religion, non plus, vous trouverez sans aucun doute des exemples où j’ai omis le ‑e terminal – le sommeil du Sanglier, en quelque sorte).
Par contre, si cet usage me semble mieux en accord avec la réalité biologique et le rôle prépondérant de la gente féminine dans les professions littéraires, j’ai toujours été conscient des défauts de ce terme auteure. Tout d’abord, le ‑e terminal ne s’entend pas, la fonction distinctive du terme est donc unidimensionnel, réservée à l’expression écrite. Et puis, c’est un terme artificiel, calqué tardivement sur d’autres exemples (étudiant / étudiante). Et pourquoi se servir d’une telle construction artificielle, si un mot hérité des siècles précédents est disponible et n’attend que d’être sorti du placard où les prétentions des « Immortels » l’ont relégué avec la quatrième édition de leur dictionnaire en 1762, et pendant bien trop longtemps ? Je parle bien évidemment du terme autrice, remis à l’honneur et activement revendiqué, entre autres, par Aurore Evain, femme de théâtre et – autrice. Votre serviteur n’est bien entendu pas le premier à franchir le cap du bon usage, et j’ai l’honneur d’y retrouver, par exemple, mon confrère Neil Jomunsi, animateur de page42.org et des éditions Walrus. Et il y a aussi l’exemple de nos voisins du Sud, où la parola « autrice » est utilisée depuis longtemps sans que cela ne dérange personne. Et comme l’héritage latin oblige… ;-)
À partir de maintenant, vous me verrez donc me servir de ce beaux mot au passé vénérable qui sent si bon la (très) vieille France, un terme qui allie la tradition à l’énorme importance des femmes de lettres dans la littérature moderne – érotique ainsi que tout court. Et à l’intention de celles et de ceux qui serait tentés de m’opposer une fin de non-recevoir en prétendant que le terme serait « moche », je réponds que l’usage viendra à bout de vos réticences. Tout n’étant, finalement, qu’une question d’usage…
Commentaires
Une réponse à “Auteur, auteure, autrice – comment désigner une femme qui écrit ?”
Autrice… Pourquoi pas. Effectivement, ça sonne mal. L’usage en viendra-t’il à bout ? Je l’ignore. Pour ma part j’accepterai plus volontiers auteure, mais ce n’est qu’une question de préférence en terme de sonorité. En revanche, je persiste à m’interroger : mais pourquoi faut-il donc absolument tout conjuguer au féminin aujourd’hui ? Le sexe de l’auteur(e) aurait-il une influence sur le traitement réservé au texte ? Certains le pensent, j’avais eu quelques échanges à ce sujet avec Christophe Vagant, qui me laisse à penser qu’effectivement, ce serait le cas… http://goo.gl/Vr2iRC